Aucun engrais ni produits phytosanitaires ne peuvent être épandus sur les surfaces agricoles situées dans l’ERE. Les dispositions relatives à la protection des eaux prévoient que la surface peut uniquement être exploitée sous forme de prairie extensive, de prairie riveraine d’un cours d’eau, de surface à litière, de pâturage extensif, de pâturage boisé, de haie, de bosquets ou de berge boisée.
En bref
- Les cantons ont l’obligation de délimiter un espace réservé aux eaux (ERE) le long des eaux de surface.
- On se base pour cela sur la largeur naturelle du fond du lit du cours d’eau, qu’il faudrait vérifier sur place.
- Réserver un espace pour les cours d’eau enterrés ou de très petite taille n’a souvent pas de sens.
- Les surfaces concernées ne donnent pas droit à des indemnités malgré les restrictions.
Calcul de l’espace réservé aux eaux
La largeur de l’ERE est déterminée sur la base d’une formule définie dans l’ordonnance sur la protection des eaux. Cette formule se fonde uniquement sur la largeur naturelle du fond du lit (voir graphique). Ainsi, la qualité du terrain agricole avoisinant ou la pente du terrain sur lequel s’écoule le cours d’eau, par exemple, ne jouent aucun rôle.
Sur le Plateau, il est souvent difficile de savoir si la largeur du fond du lit existante représente sa largeur naturelle. Une certaine marge de manœuvre existe pour cette évaluation, laquelle peut conduire à des estimations différentes de la part des services administratifs et des agriculteurs·trices. Lorsqu’il n’y a pas de largeur naturelle du fond du lit, celle-ci doit être calculée. C’est par exemple le cas lorsque les rives sont aménagées et s’apparentent à un canal. Diverses méthodes peuvent alors être utilisées. La méthode qui se base sur un tronçon de référence est simple. Il faut toutefois vérifier que le tronçon de référence choisi est bel et bien comparable. On applique souvent un facteur de correction en multipliant la largeur du lit mouillé par 1,5 (en cas de variabilité limitée de la largeur) ou par 2,0 (en l’absence de variabilité de la largeur).
Dans de nombreux cas, la largeur de l’espace réservé aux eaux n’est déterminée que « dans un bureau ».
De nombreux cas montrent que, lors des travaux de planification, la largeur de l’ERE est souvent déterminée sans évaluation sur place, et donc uniquement « dans un bureau ». C’est pourquoi on recommande aux propriétaires fonciers concernés de contrôler la largeur réelle du fond du lit existant et de vérifier s’il est effectivement justifié d’admettre une variabilité de largeur limitée, par exemple.
Renonciation pour les cours d’eau enterrés
Dans certains cas, notamment pour les cours d’eau enterrés, on peut renoncer à la délimitation d’un ERE. Lorsqu’un ERE est délimité pour de tels cours d’eau, les responsables de la planification avancent souvent que cet ERE n’entraîne aucun inconvénient.
Or ce n’est pas le cas. Bien qu’elle ne restreigne pas l’exploitation, la délimitation d’un ERE comporte des inconvénients pour le propriétaire foncier. En effet, le cours d’eau enterré devra être ouvert et revitalisé ultérieurement en vertu de la législation sur la protection des eaux. Le futur tracé du ruisseau ouvert est ainsi déterminé par l’ERE et il ne serait plus possible de définir par la suite un autre tracé, potentiellement plus adapté et plus judicieux, sans le consentement des autres propriétaires fonciers. Ces derniers pourraient s’y opposer en avançant l’argument que le ruisseau doit être ouvert dans l’ERE, qui a été délimité dans ce but. Délimiter un ERE le long d’un cours d’eau enterré n’a donc de sens que s’il correspond au tracé adéquat du ruisseau qui pourrait être mis à ciel ouvert.
Renonciation pour les très petits cours d’eau
On peut aussi renoncer à délimiter un ERE pour les très petits cours d’eau. Les dispositions relatives à l’ERE ne contiennent cependant pas de description de ces cours d’eau. La délimitation diffère selon les cantons. Dans la plupart des cas, un ERE est prévu pour tous les cours d’eau qui figurent sur la carte nationale au 1 : 25 000. On peut parfois renoncer à l’ERE pour les ruisseaux dont le fond du lit est inférieur à une certaine largeur et qui sont donc considérés comme de très petits cours d’eau. Il s’est toutefois avéré que toutes les lignes bleues dessinées sur la carte nationale au 1 : 25 000 ne peuvent pas être considérées comme des cours d’eau. Des discussions surviennent aussi lorsqu’il est question de délimiter un ERE le long du lit d’un cours d’eau où de l’eau ne s’écoule que ponctuellement, par exemple après une forte pluie.
Une des justifications des autorités responsables de la planification est que l’ERE doit aussi servir de protection contre les crues. On peut rétorquer que la protection contre les crues peut aussi être assurée avec une autre mesure de planification, par exemple avec des lignes de construction entre lesquelles aucune restriction d’exploitation n’est nécessaire.
Pas d’indemnisation en dépit des restrictions
Même sans ERE, des bandes tampon doivent déjà être respectées le long des eaux de surface. Si un ERE est délimité, la surface fertilisable diminue encore. De plus, la bande tampon en place doit être élargie pour les ruisseaux plus grands. Les surfaces jusqu’alors pâturées, en particulier, subissent des restrictions. Lors de la conversion d’un pâturage permanent en pâturage extensif, diverses exigences doivent être remplies. Il n’est ainsi par exemple plus autorisé de distribuer du fourrage d’appoint sur le pâturage, qui ne doit compter que des plantes fourragères peu intensives.
Etant donné que les surfaces se trouvant dans l’ERE fournissent moins de rendement à cause des restrictions d’exploitation, la question de l’obligation d’indemniser se pose souvent. Les dispositions relatives à la protection des eaux prévoient que les surfaces restent utilisables pour l’agriculture et que leur utilisation en tant que surfaces de promotion de la biodiversité peut donner droit à des paiements directs. Par conséquent, l’obligation d’indemniser ne serait pas applicable devant un tribunal.