L’ordonnance sur l’agriculture biologique de la Confédération exigeant que les porcs doivent être alimentés à raison de 100 % avec des matières premières bio entrera en vigueur en 2023. Le gestionnaire de label et la branche ont décidé de franchir cette étape pour l’alimentation des porcs d’engraissement bio dès le 1 er janvier 2022. Il ne sera dès lors plus possible de conserver la part de 5 % de composants alimentaires conventionnels dans les aliments biologiques pour porcs d’engraissement.
Plus de protéine de pomme de terre
Jusqu’ici, la part de 5 % de composants conventionnels contenus dans les aliments bio pour porcs d’engraissement était principalement constituée de protéine de pomme de terre. La protéine de pomme de terre contient des acides aminés équilibrés et très digestes. Le déficit en acides aminés des matières premières bio disponibles peut ainsi être compensé. Cela permet d’atteindre une performance d’engraissement optimale et d’obtenir des carcasses présentant une part de viande maigre (pVm) correspondant aux exigences du marché. La faible part en acides gras mono-insaturés (MU-FA) et polyinsaturés (PUFA) est un autre avantage. Ces paramètres définissent la qualité de graisse des carcasses. Plus la part de MUFA et de PUFA est élevée et moins la graisse corporelle est stable, raison pour laquelle elle s’oxyde rapidement. Le risque de déductions augmente en raison des teneurs en PUFA et en iode. Actuellement, il est impossible de trouver de la protéine de pomme de terre en qualité bio sur le marché et il n’existe pas d’alternative équivalente. Le gestionnaire de label interdit l’utilisation d’acides aminés produits (isolés) synthétiquement. Par conséquent, les deux grands avantages de la protéine de pomme de terre dans les recettes seront perdus.
Actuellement, sur le marché, il n’y a pas de protéine de pomme de terre de qualité bio.
Conséquences au niveau des recettes
Les légumineuses (pois et féverole) et les tourteaux (soja et colza) issus de la production d’huile alimentaire sont des solutions alternatives. Aucun de ces groupes de produits ne réunit cependant tous les atouts de la protéine de pomme de terre. Les tourteaux d’oléagineux sont certes prédestinés pour élaborer des aliments bio à l’intention des porcs. La qualité élevée de leurs protéines et la durabilité qui les caractérise en tant que sous-produits de la fabrication de denrées alimentaires font d’eux d’excellents composants pour les aliments d’engraissement bio. Les « bons » acides aminés contenus dans les tourteaux sont malheureusement contrebalancés par la forte proportion d’acides aminés insaturés et les exigences relatives à la qualité de la graisse au niveau des carcasses. Ces facteurs limitent leur utilisation. Pour les légumineuses, c’est le contraire. S’agissant du type de graisses qui les composent, les légumineuses peuvent être utilisées en grandes proportions. On constate par contre un déficit au niveau des acides aminés, surtout pour la méthionine. Un impact négatif sur le niveau de charnure des carcasses n’est par conséquent pas exclu. Le passage aux nouvelles matières premières utilisées dans les aliments bio destinés aux porcs d’engraissement implique des adaptations de teneurs. Cette nouvelle composition des aliments a pour objectif d’assurer un approvisionnement aussi optimal que possible des porcs d’engraissement bio en énergie, en pro téine / acides aminés et en minéraux lors de chaque phase d’engraissement.
Nouvel assortiment d’aliments bio pour les porcs
Les nouvelles teneurs de l’assortiment d’aliments bio à l’intention des porcs sont désormais disponibles sur internet.
L’aliment bio acheté en 2021 peut encore être distribué en 2022.
Qualité de la graisse et de la viande
Jusqu’à maintenant, il n’a pas été possible d’atteindre un équilibre entre la qualité de la graisse et la qualité de la viande. Dans le cadre du projet commun « Porc bio 100.0 » d’Agroscope, Suisag et de la HAFL, un essai d’engraissement a été réalisé dans quatre exploitations. Dans cet essai, le même aliment 100 % bio a été comparé avec son pendant actuel à 95 % bio. Tous les groupes considérés dans l’essai ont subi des déductions pour la qualité de la graisse. Bien que l’aliment testé ait été le même dans ces quatre exploitations, les valeurs PUFA et les teneurs en iode ont énormément varié d’une exploitation à l’autre. Cela montre qu’hormis l’aliment, d’autres facteurs influencent la qualité de la graisse (voir « notre conseil »). On peut donc s’attendre à ce que le pourcentage de porcs de boucherie subissant des déductions augmente dès le mois de mars 2022. Les essais de transformation réalisés dans le cadre du projet « Porc bio 100.0 » ont néanmoins montré qu’il est parfaitement possible d’élaborer des produits carnés à base de lard affichant une valeur PUFA élevée (18,3), et ce sans que la qualité en pâtisse. Les analyses basées sur des capteurs et l’enquête auprès des consommateurs·trices n’ont pas permis de constater des différences significatives entre les différentes variantes. Par conséquent, l’ensemble de la branche doit s’efforcer de satisfaire les exigences diverses et variées qui prévalent tout au long de la chaîne, du gestionnaire de label aux consommateurs·trices.
Solution intermédiaire
Dès le 1 er mars 2022, afin de soutenir le passage à l’alimentation 100 % bio, les acheteurs de bétail de boucherie adapteront pour une période probable de deux ans leur schéma de déduction pour la viande de porc bio ne remplissant pas les paramètres de graisse. Les producteurs·trices, les moulins et les entreprises de transformation ont ainsi la possibilité de réaliser des expériences supplémentaires avec l’alimentation bio à 100 % et d’optimiser l’alimentation.
Notre conseil
Identifier et réagir rapidement
- L’alimentation ciblée par phase met idéalement à profit le potentiel de couverture de viande des animaux, lors de chaque période d’engraissement.
- Un engraissement séparé selon les sexes permet une alimentation ciblée.
- Un poids final correct a un impact positif sur la composition de la carcasse.
- Seuls les animaux en bonne santé, exempts de vers et élevés dans un climat de porcherie optimal atteignent les performances que l’on attend d’eux.