Elevage du bétail laitier
Les directives européennes en matière de protection des animaux et l’ordonnance allemande sur la protection des animaux ne contiennent pas de dispositions détaillées sur la garde des bovins âgés de plus de six mois. Concrètement, il est par conséquent impossible d’effectuer un comparatif sur les dimensions, les surfaces nécessaires, etc. entre les prescriptions suisses et étrangères en matière de détention animale.
Le présent article est par conséquent plutôt consacré aux différences entre la Suisse et les pays limitrophes dans les domaines de l’affouragement, de la pâture et des divers modes de garde. Quelques lignes sont en outre consacrées au thème de l’abattage sans anesthésie.
Bref aperçu de l’abattage sans anesthésie
La production laitière est intimement liée à la production carnée, que ce soit de manière directe (animaux réformés) ou indirecte (animaux mâles pour l’engraissement).
En Suisse, la loi stipule clairement que les animaux vertébrés abattus doivent être préalablement anesthésiés de manière efficace, que ce soit à l’aide d’un pistolet à goujon, d’une pince électrique ou d’un bain CO². Les méthodes autorisées et appropriées pour chaque catégorie animale sont consignées dans l’ordonnance sur la protection des animaux. L’abattage sans étourdissement préalable de l’animal est donc interdit en Suisse et ce depuis plus de 125 ans. Seule la volaille est exemptée de cette règle. D’une manière générale, la volaille doit certes être anesthésiée mais des exceptions sont autorisées pour les abattages rituels. Il est par ailleurs possible d’importer de la viande cachère ou halal, la Confédération octroyant des contingents douaniers annuels à cet effet.
En Allemagne, les animaux vertébrés doivent également être anesthésiés avant l’abattage. Des dérogations peuvent néanmoins être accordées aux abattoirs qui doivent répondre aux exigences de certaines communautés religieuses. En Europe, seuls la Suède, la Norvège, l’Islande, le Danemark et les Pays-Bas interdisent l’abattage sans anesthésie.
Fromage et autres
La Suisse est le pays des vaches, du fromage et du chocolat. Les vaches au pâturage contribuent beaucoup à l’image que l’on se fait des paysages suisses. D’un point de vue économique, la production laitière est le principal secteur de l’agriculture suisse, avec une part d’environ 20 %. Avec quelque 21 000 producteurs, plus de 40 % des exploitations agricoles suisses produisent du lait.
Forte proportion de pâturage
En 2015, plus de 70 % des producteurs de lait élevaient leurs vaches dans des stabulations entravées. Rapportée au nombre de vaches laitières, la proportion est un peu différente: 55 % des vaches laitières sont élevées dans des stabulations entravées. Cet écart est dû au fait que les exploitations disposant d’une stabulation entravée détiennent souvent moins de vaches que celles qui sont équipées d’une stabulation libre.
La détention en stabulation libre est encouragée financièrement par les contributions SST (systèmes de stabulation particulièrement respectueux des animaux) privilégiant le bien-être animal. Le taux de participation à ce programme augmente chaque année.
Outre le programme SST introduit en 1996, le programme de bien-être animal SRPA (sorties régulières en plein air) est appliqué depuis 1993. La proportion d’exploitations participant à ce programme est encore plus élevée: plus de 83 % des vaches laitières suisses pâturent au moins 26 jours par mois du 1 er mai au 31 octobre tout en ayant accès au moins 13 fois par mois à l’aire de sortie ou au pâturage. Quelque 110 000 vaches laitières (soit environ 1/5 des vaches laitières suisses) passent l’été à l’alpage.
Allemagne: petites exploitations en stabulations entravées
En Allemagne, la situation est assez similaire: en 2010, 63 % des exploitations détenaient leur troupeau en stabulation entravée et ce nombre peut même être rapporté à 27 % pour les vaches laitières. La grande différence par rapport à la Suisse est que les vaches détenues en stabulation entravée ne doivent pas nécessairement disposer d’une aire de sortie. En Suisse, l’ordonnance sur la protection des animaux stipule que les bovins en stabulation entravée doivent sortir à l’extérieur pendant au moins 60 jours en été et 30 jours en hiver. Les vaches en stabulation libre doivent disposer chacune d’une logette recouverte d’une litière souple. Les sureffectifs sont interdits. L’ordonnance suisse sur la protection des animaux contient des dispositions détaillées en ce qui concerne les dimensions des logettes, des places à la table d’affouragement, des couloirs et du box de vêlage. Les prescriptions en la matière font également l’objet de contrôles réguliers. En Allemagne et dans l’UE, il n’existe pas de lois ou d’ordonnances régissant la détention des bovins de plus de six mois.
Production laitière basée sur une forte proportion d’herbages
En raison de sa topographie, la Suisse est le pays des herbages par excellence. La part des fourrages grossiers dans la ration y est donc nettement supérieure à la moyenne. Depuis quatre ans, la distribution de fourrages grossiers est encore encouragée par les contributions liées au système de production versées dans le cadre de la «Production de lait et de viande basée sur les herbages» (PLVH). Ce programme limite la part des concentrés à 10 % de la matière sèche ingérée et fixe la part des herbages à au moins 75 % de la ration en zone de plaine (85 % en zone de montagne), ce qui réduit également la part du maïs et des fourrages humides dans la ration. La participation à ce programme a été très élevée et ce depuis le début: dès la première année, plus de 80 % des exploitations commercialisant du lait ont en effet souscrit à la PLVH. Une étude récente réalisée par Agroscope sur mandat de l’Office fédéral de l’agriculture démontre que 50 % des exploitations commercialisant du lait satisfaisaient déjà aux directives de la PLVH avant le lancement de ce programme. Il ressort ainsi clairement que le fourrage de base joue un rôle très important dans la production laitière suisse. En moyenne suisse, la quantité d’aliment composé distribuée s’élève à 150 g/kg de lait. La distribution de fourrages de base de bonne qualité permet d’atteindre facilement des performances de 6000 kg de lait par vache. Les analyses internes effectuées par UFA dans le cadre d’UFA Herd Support (155 exploitations) sont même arrivées à des performances de 6800 kg de lait par vache et par année à partir du fourrage de base (en 2016). Ces exploitations atteignent notamment un tel niveau de production laitière à partir du fourrage de base grâce à une complémentation idéale du fourrage de base. A l’école d’agriculture du Plantahof, le troupeau affouragé avec une forte proportion de fourrage de base est même arrivé à une performance moyenne de 8000 kg de lait au cours d’un essai réalisé sur la période 2003-2007, sans distribution de concentrés. Selon l’Office fédéral de la statistique et swissmilk, en Suisse l’utilisation de concentrés s’élève à environ 800 kg par vache laitière. Dans l’UE, les quantités d’aliments concentrés distribuées oscillent entre 2000 kg et 2500 kg par vache et par année.
En Allemagne, les valeurs cibles s’élèvent à 250 g de concentré par kilo de lait et une production laitière de l’ordre de 3000 à 4000 kg à partir du fourrage de base. Les chiffres évoqués plus haut démontrent clairement que les producteurs de lait tiennent compte du fait que la Suisse est un pays d’herbage et qu’ils tirent le meilleur parti des conditions topographiques et climatiques au sein desquelles ils évoluent. Le lait produit en Suisse est exclusivement produit à partir de fourrages exempts d’OGM. En Allemagne, cette proportion représente seulement 12 % du lait commercialisé. Pour le lait exempt d’OGM, les producteurs allemands bénéficient toutefois d’un supplément de 3 cents par kilo de lait.
Conclusion
En ce qui concerne la production laitière, il est impossible de procéder à un comparatif direct avec l’Allemagne et l’UE, la Suisse étant la seule à émettre des directives spécifiques en matière de protection des animaux. En ce qui concerne l’élevage bovin, les directives allemandes et européennes ne régissent que la catégorie des veaux (jusqu’à l’âge de 6 mois). Il n’existe pas de différences substantielles en ce qui concerne le mode de détention des animaux. Tant en Suisse qu’en Allemagne, les vaches laitières sont détenues aussi bien en stabulation libre qu’en stabulation entravée. En ce qui concerne le mode de garde en stabulation entravée, la différence réside plutôt dans les sorties régulières dont bénéficient les vaches suisses. En outre, une très grande partie des vaches laitières bénéficie des programmes de bien-être animal SST (45,8 %) et SRPA (83,3 %). Le nombre de producteurs participant à ces deux programmes progresse constamment.
Au niveau de l’affouragement, la Suisse et l’Allemagne se distinguent surtout par l’utilisation de concentrés, qui atteint un niveau nettement plus élevé en Allemagne qu’en Suisse. Bon nombre d’exploitations suisses participent au programme PLVH, qui fixe la part des fourrages grossiers dans la ration et qui limite l’utilisation de concentrés.
Auteure
Sandra Frei, Revue UFA, 3360 Herzogenbuchsee
Dans le cadre d’une série de six articles, les standards de protection animale suisses sont comparés à ceux qui sont pratiqués en Allemagne et dans l’UE, ce qui permet de démontrer la plusvalue de la production suisse. Cette série est consacrée aux catégories animales poules pondeuses, engraissement de poulet, production de viande de veau et de bœuf, production laitière ainsi qu’à l’élevage et à l’engraissement porcin.