Les alpages sont désormais eux aussi touchés par la maladie de Mortellaro (appelée également dermatite digitée). Or, pour contaminer les animaux alpés, il n’existe qu’un seul vecteur d’infection: les animaux porteurs malades qui sont montés à l’alpage au printemps. Une météo pluvieuse et chaude ou la présence de zones humides autour des abreuvoirs suffit alors pour que des animaux sains mais dont le système immunitaire est légèrement affaibli puissent être contaminés. Les animaux infectés qui quittent l’alpage pour revenir sur l’exploitation de plaine représentent un risque élevé pour leurs congénères, qui peuvent être infectés à leur tour.
Contrôle
Idéalement, il faudrait contrôler que les animaux estivés ne sont pas affectés par la dermatite digitée dès leur retour de l’alpage. Un simple « contrôle de boiterie » ne suffit pas, sachant que les bovins infectés ne boitent généralement qu’au stade aigu (stade M2). Il faudrait au moins bloquer chaque animal (par exemple au cornadis) pour contrôler la pré-
sence de la maladie de Mortellaro. Une fois les onglons bien lavés, un œil expérimenté suffira la plupart du temps à identifier les onglons touchés. Une détection certaine de la dermatite digitée implique toutefois de passer chaque animal au congrain (cage de parage). Une étude réalisée aux Etats-Unis confirme que les cas de Mortellaro sont nettement mieux identifiés au congrain qu’au cornadis. Les bovins infectés doivent être traités comme indiqué dans l’encadré. Un contrôle ultérieur des animaux infectés, pour vérifier que la maladie est effectivement guérie, doit aussi être effecué. Le temps consacré au contrôle des animaux revenant de la saison d’estivage en vaut la peine, surtout lorsque cela permet d’éviter la propagation de la maladie de Mortellaro au sein du troupeau. Une fois que cette maladie est présente à l’étable, il est impossible de l’éliminer.
Dermatite digitée – soins et prévention méthodiques
Le médecin allemand Christoph Wilhelm Hufeland l’affirmait déjà au 18 e siècle: « prévenir vaut mieux que guérir ». Lorsqu’une exploitation est confrontée à des problèmes de Mortellaro, il faut adopter un plan précis et faire preuve de beaucoup de discipline pour obtenir une amélioration durable.
Le marché des produits utilisés pour soigner les dermatites digitées est gigantesque et il est par conséquent difficile de disposer d’un bon aperçu. Quand le succès n’est pas au rendez-vous, la tentation est grande de tester un autre produit. Plusieurs études ont confirmé que l’obtention de résultats durables implique que la thérapie soit appliquée sur une longue période et, surtout, de manière ciblée. Une étude actuelle (exposé M. Klawitter et al., 2016, 29th WBC, Dublin) démontre que l’utilisation de produits contenant des antibiotiques entraîne une augmentation des stades chroniques (M4). Les animaux souffrant de dermatite digitée à des stades chroniques peuvent rapidement développer à nouveau des lésions aigües et représentent donc un risque de contagion important pour les autres vaches. Il faut donc tout faire pour éviter l’apparition de stades M4. Nous recommandons par conséquent d’utiliser des produits à base de liaisons de cuivre et de zinc chélatées (Repidermaspray, Intra Hoof fit), qui ont un effet antibactérien et qui peuvent ainsi favoriser la guérison des lésions. En présence de stades actifs (M1, M2 et M4.1), l’utilisation de produits contenant de l’acide salicylique (p. ex. Novaderma), comme substance active, a permis d’obtenir de bons résultats.
D’une manière générale, il convient de préciser qu’indépendamment du traitement choisi, les pansements sont indispensables. Les pansements contribuent à réduire la douleur éprouvée par les animaux et à soigner les infections. Au niveau du troupeau, la pose de pansements contribue à réduire la propagation des agents pathogènes dans l’environnement des animaux, ce qui réduit nettement la pression exercée par les germes pathogènes et le risque de contamination à l’étable. Il a été prouvé que la pose répétée d’un pansement (à deux ou trois reprises), à intervalles de 5 à 7 jours, augmentait massivement le succès du traitement (exposé de M. Klawitter et al, 2016, 29th WBC, Dublin). Vous trouverez des recommandations de traitement précises dans l’encadré de la page précédente.
Le genre de traitement n’est pas le seul facteur important. Ce qui compte, c’est également la vitesse à laquelle les animaux malades sont identifiés et soignés. Dans ce domaine également, plus on intervient rapidement (dans les 24 heures) et plus le succès est au ren-dez-vous. Une réaction rapide permet d’éviter des douleurs et un stress inutiles à l’animal. Un traitement immédiat et ciblé joue un rôle central dans la lutte contre la maladie de Mortellaro. Une bonne gestion du traitement contre la dermatite digitée doit toutefois être complétée et renforcée par d’autres mesures comme une meilleure évacuation des déjections et un parage approprié.
Prévention
Toutes les mesures préventives qui sont appliquées pour les vaches laitières doivent aussi l’être dans les exploitations d’élevage, surtout en cas de pression infectieuse élevée.
- Ne pas intégrer d’animaux infectés au sein du troupeau – Achat d’animaux – Exposition – Exploitation d’élevage – Estivage – Informer l’ongleur du danger de contamination résultant de l’utilisation d’instruments de soins aux onglons non désinfectés.
- Appliquer les mesures préventives du concept santé – Hygiène – Parage des onglons – Affouragement – Renforcement du système immunitaire (élevage, approvisionnement en minéraux inclus)
Le pâturage est positif, mais…
D’une manière générale, le pâturage, et par conséquent l’estivage, réduisent le risque de Mortellaro, car les onglons sont plus propres et plus secs. Les endroits humides (abreuvoirs, entrées de parc) sont toutefois des zones où le risque d’infection est élevé. La règle suivante s’applique également au pâturage: un animal sain et non stressé a moins de risques d’être infecté. Les bovins et les vaches mères qui restent nuit et jour au pâturage doivent bénéficier d’un approvisionnement suffisant en minéraux pour couvrir leurs besoins et renforcer leur système immunitaire. Une pierre à lécher (au moins) devrait donc être disponible sur chaque pâturage ou sur chaque alpage. La meilleure solution consiste à distribuer du sel minéral dans un microfeeder UFA ou dans un basisfeeder UFA par exemple.
Aussi chez les vaches mères...
Aujourd’hui encore, les sels minéraux ne sont pas toujours distribués de manière systématique. Or, s’il s’agissait d’une pratique standard, la maladie de Mortellaro ne serait probablement pas aussi répandue dans les exploitations de vaches mères. Il arrive même que des veaux de vaches mères soient infectés à l’âge de quelques semaines seulement. Dans ce genre de cas, on estime que les veaux concernés présentaient à leur naissance un système immunitaire passif affaibli. Il convient alors d’analyser de façon approfondie comment la mère du veau concerné a été nourrie au cours des dernières semaines de gestation. Pour renforcer le système immunitaire de la mère et pour que cette dernière produise un colostrum de haute qualité assurant la meilleure protection possible au veau nouveau-né, il est essentiel que l’approvisionnement en nutriments et en minéraux couvre les besoins de la vache.