Chaque année, en Suisse, près de 350 000 veaux quittent les exploitations laitières où ils sont nés pour rejoindre une exploitation d’engraissement spécialisée. Ces veaux sont un maillon essentiel pour l’ensemble de la branche, raison pour laquelle leur approvisionnement joue un rôle essentiel, dès la naissance.
Avant la naissance
S’agissant de la qualité des petits veaux, les exploitations laitières sont incontestablement le maillon le plus lors de l’insémination. En recourant à la semence sexée, chaque exploitation conventionnelle peut inséminer ses vaches à haut potentiel génétique de manière à ce que celles-ci donnent naissance, dans 90 % des cas, à une remonte d’élevage. Cette façon de procéder permet d’inséminer le reste du troupeau avec des taureaux race à viande comme des Limousin ou des Angus. Plusieurs prestataires de génétique disposent de semence mélangée composée de deux ou trois taureaux de race d’enimportant. Le premier jalon est posé graissement (p. ex. Silian ou Lian). La semence sexée est aussi disponible pour les races à deux fins, comme la Race brune originale et la Simmental. Plus les vaches d’un même troupeau vivent longtemps, plus le taux de remonte nécessaire est faible et plus la part de vaches pouvant être inséminées avec des races à viande est élevée. L’écart de prix entre les petits veaux AA (veaux très charnus) et A (veaux peu charnus) est souvent de l’ordre de cinq francs par kilo de poids vif (PV). Pour un PV de 80 kg, cela représente un écart de 400 francs. L’affouragement pratiqué pendant la phase de tarissement est un autre élément décisif pour qu’un veau soit en bonne santé à sa naissance. Un affouragement conforme aux besoins de la phase de tarissement et basé sur un approvisionnement en minéraux et en vitamines adapté est bénéfique pour la vache, améliore la qualité du colostrum et contribue au bon développement du veau à naître. Lorsque les veaux récemment arrivés à l’étable souffrent de problèmes de santé, il est donc particulièrement important d’analyser de près l’approvisionnement des vaches taries.
Une règle absolue
Un approvisionnement suffisant en colostrum est essentiel pour que chaque nouveau-né soit en bonne santé dans son exploitation de naissance, puis dans l’exploitation où il sera engraissé. Pour ce faire, on applique la règle des 3 Q. « Quickly » : le plus rapidement possible. Cela signifie que le veau doit recevoir du colostrum au cours de ses deux premières heures de vie, voire au plus tard dans les quatre heures suivant sa naissance.
L’approvisionnement en colostrum est décisif.
« Quantity » : la bonne quantité. Cela signifie qu’il faut distribuer assez de colostrum. Quatre litres correspondent à l’objectif à atteindre. Selon diverses études scientifiques, entre 40 et 60 % des veaux ne consomment pas suffisamment de colostrum lorsqu’ils restent sans surveillance auprès de leur mère. « Quality » : qualité du colostrum. Celle-ci peut être évaluée de manière simple à l’aide d’un réfractomètre. Dès que la valeur mesurée (BRIX) est supérieure à 22 %, on part du principe que le colostrum est de bonne qualité. S’il est disponible en quantité suffisante, un lait d’une telle qualité devrait systématiquement être congelé. L’hygiène de traite et la propreté des ustensiles utilisés pour nourrir les veaux font partie intégrante de l’aspect « Quality ». On évitera de distribuer du colostrum contenant trop de germes.
Une buvée correcte
A l’image des veaux d’élevage, les petits veaux commercialisés devraient aussi avoir une programmation métabolique. Un régime de buvée intensif contribue à ce que les veaux destinés à la production carnée soient, toute leur vie durant, très résistants tout en affichant des accroissements journaliers plus élevés. Une buvée intensive signifie que les veaux ingèrent au moins 8 litres de lait par jour. Ainsi, les veaux se développent mieux et peuvent donc quitter plus tôt l’exploitation de naissance. Les veaux habitués à consommer des quantités de lait importantes s’adaptent aussi plus facilement dans l’exploitation d’engraissement. Dans l’exploitation de naissance, les veaux devraient être abreuvés à la tétine. Il faut que celleci offre assez de résistance. En effet, à leur arrivée, les veaux doivent souvent téter une tétine neuve sur laquelle ils doivent beaucoup tirer.
La meilleure solution consiste à abreuver les petits veaux au DAL. Un DAL permet d’élever des veaux d’élevage et des petits veaux au sein d’un même groupe tout en leur distribuant des quantités différentes. En plus de cela, au DAL, les veaux sont habitués à ne recevoir qu’une quantité de lait limitée par repas. Les veaux habitués à deux buvées par jour doivent s’habituer au DAL à leur arrivée dans l’exploitation d’engraissement, ce qui représente un défi.
Exploitation d’engraissement
Age et poids
L’exploitation de naissance décide de l’âge auquel elle commercialise ses veaux. Pour l’engraisseur, outre le poids, l’âge des petits veaux est un autre facteur décisif. Un veau de 80 kg de PV et âgé de 30 jours est vendu aux mêmes conditions qu’un veau de 80 kg âgé de 55 jours. Il faut néanmoins s’attendre à ce que les performances d’engraissement de ces deux veaux diffèrent totalement. Avec un poids vif à la naissance de 45 kg, le premier a enregistré un accroissement journalier de 1,16 kg contre 0,63 kg pour le second. En réceptionnant un veau, l’engraisseur sait déjà si ce dernier a été nourri correctement ou non dans son exploitation de naissance. Cela implique toutefois que l’exploitation de naissance ait inscrit la date de naissance exacte et qu’elle ait estimé correctement le poids à la naissance.
Josef Schmid, Ramsen« Je souhaite que les exploitations de naissance vaccinent leurs veaux. »
Souhaits des engraisseurs
Josef Schmid gère une exploitation à Ramsen. Il y engraisse 200 veaux par an, à raison de douze animaux par lot. Lors de l’installation à l’étable, les veaux sont traités contre les ectoparasites et vaccinés contre la grippe bovine. A ce sujet, Josef Schmid formule un premier souhait à l’intention des exploitations de naissance, à savoir que ces dernières vaccinent leurs veaux. La vaccination dans l’exploitation de naissance, de préférence au cours de la deuxième semaine de vie, est une mesure efficace pour prévenir les pneumonies au cours des deux premières semaines dans l’exploitation d’engraissement. Interrogé pour savoir à quoi correspondrait selon lui un petit veau idéal, Josef Schmid répond : « En arrivant chez nous, les petits veaux devraient peser au moins 75 kg. » Les veaux concernés devraient être issus d’un taureau race à viande (100 %). « Les veaux issus des doses Silian (sperme mélangé) conviennent bien, les trois races de taureaux présentant de bonnes caractéristiques pour l’engraissement », explique-t-il. Il préfère aussi les veaux provenant d’exploitation qui ne distribuent si possible pas de lait acidifié et qui nourrissent leurs veaux à la tétine. Le commerce est une affaire de confiance. Josef Schmid doit donc pouvoir s’appuyer sur les informations qui lui sont communiquées en matière de poids, de race et d’âge. D’un point de vue éthologique, il estime qu’il n’est pas judicieux de renvoyer un animal malade et de lui faire subir un nouveau transport. « Il faudrait tout simplement éviter de charger de tels veaux dans l’exploitation de naissance. » L’agriculteur pense que cette responsabilité est du ressort de l’exploitation de naissance et du commerce d’animaux. « La qualité doit être en adéquation avec le prix auquel je paie mes petits veaux. » L’engraisseur est d’avis qu’il existe un certain potentiel d’amélioration en ce qui concerne les transports. Pour que les veaux soient en bonne santé lorsqu’ils arrivent dans l’exploitation d’engraissement, il est par exemple important que les temps de transport soient courts. « Un chauffeur devrait savoir ce qu’il charge. » Si les veaux sont transportés par temps de pluie, il faut veiller à ce qu’ils ne soient pas mouillés pendant le transport.
« En fait, chaque éleveur sait parfaitement comment nourrir ses veaux. Un approvisionnement suffisant en colostrum après le vêlage est assurément une règle de base essentielle. D’une manière générale, on ne devrait vendre que les animaux que l’on achèterait volontiers pour soi », conclut Josef Schmid.