Le miscanthus est aussi appelé roseau de Chine. Originaire d’Asie orientale, il est cultivé en Europe depuis 1935 environ. C’est surtout l’espèce Miscanthus × giganteus (miscanthus géant) qui joue un rôle en tant que matière première renouvelable.
Facile à cultiver
Agriculteur et entrepreneur de travaux agricoles, Ueli Freudiger connaît bien le miscanthus. Il y a bientôt 30 ans, il a été le premier à initier sa culture en Suisse. Il explique : « La mise en place de la culture s’effectue en février / mars. Les rhizomes sont dispersés sur le champ avec une épandeuse à fumier, puis on laboure sur 10 cm de profondeur. » Durant la première année, les adventices sont combattues mécaniquement avec une herse étrille ou chimiquement avec un herbicide pour maïs suivant la pression qu’elles exercent. Dès la deuxième année (dans de rares cas déjà la première année), la force de concurrence du miscanthus est généralement telle qu’aucune autre mesure de lutte n’est nécessaire. La culture ne nécessite aucune autre intervention, car on ne lui connaît pour l’instant ni maladies, ni ravageurs.
La récolte peut commencer la deuxième année. Les quantités récoltées s’élèvent alors au maximum à 7 t / ha. Le plein rendement est attendu dès la quatrième année. La récolte se déroule en mars et en avril. Pour une bonne qualité de stockage, les plantes de miscanthus doivent présenter une teneur en matière sèche d’au moins 85 %. Elles sont récoltées avec une ensileuse à maïs équipée d’une barre de coupe indépendante des lignes. La quantité coupée est adaptée au débouché. Les plantes récoltées sont soit pressées en balles, soit transportées en vrac dans une autochargeuse.
Si la culture de miscanthus doit être abandonnée, les tiges sont alors broyées trois fois, puis la parcelle est réensemencée la même année (p. ex. avec du blé).
Exigences pédo-climatiques
Du point de vue du climat et du sol, les exigences du miscanthus sont semblables au maïs. Selon Ueli Freudiger, cette plante peut être cultivée sur n’importe quel sol, même les sols tourbeux humides, ainsi que sur les terrains pentus. Il a constaté que les sols tourbeux deviennent plus portants grâce aux racines. Par ailleurs, le miscanthus supporte bien les périodes de sécheresse car le sol est constamment couvert et ne se dessèche ainsi jamais.
Bon pour l’environnement
Pour Ueli Freudiger, les avantages du miscanthus sont évidents : « La culture de miscanthus favorise la biodiversité, préserve les eaux et protège le sol. » Les plantes restent en effet tout l’hiver sur le champ. Les animaux sauvages, tels que le lièvre, le renard ou le chevreuil, peuvent ainsi s’y réfugier. Excepté une à deux applications d’herbicide la première année, aucun produit phytosanitaire n’est nécessaire, ce qui préserve les eaux. La couverture permanente du sol prévient l’érosion ; les feuilles mortes servent à la production d’humus. Selon Ueli Freudiger, 1 cm d’humus est produit par année. Un calcul de Swiss Climate, à Berne, a confirmé que 32 t de CO 2 par hectare étaient captées annuellement.
Matière première recherchée
« Nous manquons de matériau », affirme Ueli Freudiger quant au potentiel d’écoulement du miscanthus. Il ajoute : « Nous pourrions commercialiser 2000 t de plus par année en Suisse. » Le miscanthus est surtout demandé par l’industrie de la construction et du plastique. Il est par exemple transformé en éléments de construction pour des maisons d’habitation, en panneaux d’isolation pour rénover des bâtiments ou en granulés pour se substituer au plastique. De plus, il peut être utilisé en horticulture, par exemple comme substitut de tourbe ou comme matériel de paillage. Actuellement, les quantités manquantes sont importées, principalement de France et d’Europe de l’Est.
La commercialisation de la matière première indigène s’effectue par le biais de la communauté d’intérêt Miscanthus (IGM). Depuis 2018, cette dernière verse 190 francs par tonne aux agriculteurs. Dès lors, pourquoi le miscanthus n’est-il pas davantage cultivé en Suisse, alors que la demande est présente ? Ueli Freudiger explique : « Le problème réside dans le manque de soutien de la Confédération. En 2016, les paiements directs pour la culture du roseau de Chine ont été supprimés. Depuis, le nombre de producteurs est passé d’environ 300 à quelque 120. » Or, cet agriculteur chevronné est certain qu’une production rentable est malgré tout possible : « Il faut considérer que les coûts et la charge de travail sont très faibles dès la deuxième année. » En raison des nouvelles exigences envers l’agriculture (PA 22+), l’organisation IGM est en train de solliciter de nouvelles contributions de la Confédération et des cantons.
Coûts
Ueli Freudiger récolte en moyenne 18 t / ha sur ses surfaces. Des essais menés en Allemagne montrent que le rendement peut dépasser 20 t / ha sur les sites propices, mais être aussi nettement plus faible dans les zones plus défavorables.
Un calcul d’Agroscope de 2010 chiffre les frais d’investissement à près de 5000 francs par hectare. Il comprend les plants (10 000 pièces à 30 ct.), le travail du sol, le désherbage mécanique et chimique ainsi que les coûts de main-d’œuvre. Ces frais sont amortis sur 20 ans. Ueli Freudiger relève que les coûts ne s’élèvent actuellement plus qu’à 3000 francs par hectare grâce à la méthode des rhizomes.
En principe, on estime qu’une culture peut rester en place 20 ans avant de devoir être remplacée. Les expériences de Ueli Freudiger montrent qu’une durée d’utilisation plus longue est aussi possible : la première culture qu’il a mise en place en 1990 fournit aujourd’hui encore des rendements élevés (voir photo).
Portrait
Agriculteur et entrepreneur de travaux agricoles, Ueli Freudiger exploite un domaine agricole de 27 ha à Gals, dans le Seeland bernois. Il cultive du miscanthus sur 340 ares, ainsi que de la betterave sucrière, du maïs et des céréales. Il emploie sept collaborateurs à l’année et jusqu’à 12 collaborateurs lors des pics de travail. Pionnier de la culture du miscanthus en Suisse, il s’investit aussi dans le développement de produits à base de miscanthus. Il collabore avec le Centre de formation et de technologie des matières plastiques (KATZ) dans le domaine des substituts au plastique et avec l’EMPA et l’ES Bois à Bienne dans le domaine de la construction.
Plus d’informations: www.nawaro.ch; www.ig-miscanthus.ch