Le charbon végétal pour stocker le carbone
La biomasse des plantes est constituée d’environ la moitié de carbone retiré de l’atmosphère par les plantes au cours de leur croissance grâce à la photosynthèse. Si les plantes meurent et se décomposent, le carbone est relâché dans l’atmosphère sous la forme de CO2. Pour éviter cela, la biomasse peut être pyrolysée, c’est-à-dire traitée thermiquement à une température d’au moins 400 °C en milieu anaérobie. Au cours de ce processus, environ 30 à 50 % du carbone d’origine végétale sont convertis en structures moléculaires stables. Le charbon végétal se forme aussi de manière naturelle lors des feux de végétation. Son temps de résidence moyen dans les sols se situe entre 1440 à 14 500 ans. La production de charbon végétal à partir de la biomasse produite par l’agriculture retire le CO2 de l’atmosphère et peut ainsi contribuer à limiter le changement climatique. Si les résidus de l’agriculture et de la sylviculture sont systématiquement transformés en charbon végétal, la Suisse pourrait séquestrer, d’ici à 2050, jusqu’à 4 millions de tonnes de CO2eq par année. Ainsi, 80 % des émissions de gaz à effet de serre qui subsisteront probablement à cette date en Suisse pourront être compensées.
Fertilité du sol accrue, émissions réduites
Les sols traditionnels de Terra Preta en Amazonie sont connus pour leurs rendements élevés dus aux propriétés positives du charbon végétal. Dans notre pays aussi, le charbon végétal peut être utilisé dans l’agriculture comme fertilisant et matrice de support pour les engrais, mais également comme additif fourrager, litière ou encore comme additif pour le lisier. Un grand nombre d’études internationales confirment qu’il peut augmenter le rendement, la densité des racines, l’activité microbienne, la formation de matière organique dans le sol et l’efficience en termes d’utilisation de l’eau ainsi que réduire les émissions de gaz à effet de serre d’environ 30 % par ha. Cette seule réduction permettrait d’économiser environ 8,6 % des émissions agricoles et donc environ 1,2 % de l’ensemble des émissions de gaz à effet de serre en Suisse grâce au charbon végétal.
En Suisse, le charbon végétal sert avant tout à la protection du climat
Les plus fortes augmentations de rendement avec du charbon végétal pur sont obtenues sur des sols acides, tropicaux et pauvres en matière organique. Pour la Suisse, on recommande plutôt une fertilisation à base de charbon végétal. A cet effet, le charbon végétal est chargé d’engrais organiques ou minéraux et introduit dans la zone racinaire des plantes, ce qui promet des augmentations de rendement, en particulier dans les cultures spéciales. En Suisse, c’est plutôt la protection du climat, l’amélioration de l’activité microbiologique du sol, la disponibilité de l’eau pour les plantes et la réduction du lessivage des nitrates qui pourraient potentiellement tirer le plus grand avantage de l’utilisation de charbon végétal.
Le charbon végétal est actuellement utilisé surtout dans l’élevage comme additif fourrager, pour des raisons économiques. L’apport se fait essentiellement par les engrais de ferme, qui sont principalement épandus sur les pâturages, les prairies temporaires et les cultures céréalières.
Approbation indispensable pour la production charbon végétal à partir de résidus agricoles
À ce jour, seul le bois non traité est autorisé en Suisse comme matière première pour lea production de charbon végétal. Cependant, du point de vue de la protection du climat et de la bioéconomie, le bois de haute qualité provenant des forêts devrait d’abord être utilisé comme matériau de construction pour remplacer les matériaux fossiles ou à forte consommation énergétique tels que l’acier, le béton ou les matières plastiques. Seules des matières secondaires et des biomasses qui ne peuvent pas être utilisées à d’autres fins devraient être soumises à une pyrolyse. Le charbon végétal issu de biomasses non ligneuses telles que la paille présenterait également des avantages agronomiques, par exemple une teneur en substances minérales plus élevée et des macropores plus grands, qui améliorent la colonisation microbienne. Il convient donc d’examiner la possibilité d’autoriser les résidus de la production agricole et forestière comme matière première pour la production de charbon végétal.
Seul du charbon végétal certifié doit être utilisé
Au cours de la pyrolyse, des polluants organiques apparaissent sous la forme d’hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP). Si la pyrolyse n’est pas effectuée correctement, ceux-ci peuvent se déposer sur et dans le charbon végétal. Il faut donc prêter attention aux prescriptions du certificat européen pour le charbon végétal (EBC), applicables en Suisse.
Source: Agroscope