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Production végétale

Seul un sol sain est productif

Le sol n’est pas une ressource renouvelable et sa disponibilité est limitée. Il faut donc le traiter avec ménagement. Mais comment ? Et quelles sont les mesures culturales qui préservent, voire augmentent sa fertilité ?

Les vers de terre dégradent la matière organique, la mélangent avec la terre fine et contribuent ainsi à améliorer la structure...

Les vers de terre dégradent la matière organique, la mélangent avec la terre fine et contribuent ainsi à améliorer la structure du sol.

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Actualisé le

Collaboratrice scientifique, groupe de recherche extension cultures maraîchères, Agroscope

Fertilité du sol

En production végétale, le sol est un facteur de production fondamental. Outres les facteurs environnementaux, une exploitation incorrecte des surfaces cultivées peut être source de dégâts pour le sol, comme le tassement, l’érosion et la baisse de la fertilité, dont souffre également la croissance des plantes.

Sols sous pression

À la fin novembre 2017, l’Office fédéral de l’environnement (OFEV) a publié un rapport intitulé « Sols suisses: Etat et évolution – 2017 ». Il en ressort qu’il n’existe pratiquement plus en Suisse de sols intacts. Les sols sont dégradés par les substances toxiques, le compactage, l’érosion et le tassement, ainsi que par la perte d’humus et de biodiversité. Malgré les différentes mesures prises pour le protéger, ses fonctions ne sont pas toutes durablement garanties, dit ce rapport, qui considère par ailleurs que le changement climatique va compliquer la situation. Notamment par l’augmentation des risques de fortes précipitations entraînant un surcroît d’érosion. C’est pourquoi l’OFEV, en collaboration avec des partenaires de la Confédération et des cantons, élabore actuellement un projet de stratégie pour le sol. Celle-ci entend proposer des pistes sur la façon d’aborder les défis posés dans le domaine de l’aménagement du territoire, de l’agriculture et de la protection de l’environnement et sur les possibilités d’intégrer au mieux la conservation ou la restauration des fonctions du sol dans ses différentes utilisations.

Office fédéral de l’environnement (OFEV)

Tassement du sol

Chaque fois que l’on roule sur un champ, les machines et les outils exercent une pression. Si cette pression est plus grande que la portance du sol, ce dernier se tasse. La pression dépend de la charge des roues, soit du poids des machines et de leur chargement, et de la surface de roulement des pneus. La portance du sol est quant à elle influencée par son degré d’humidité, sa teneur en argile et sa structure.

Dans des sols compactés, les plantes font face à des conditions de germination et de croissance défavorables. En raison de la destruction de la structure du sol, elles produisent une masse racinaire plus faible et absorbent par conséquent moins de nutriments. Par ailleurs, les organismes du sol étant défavorisés, ils produisent moins de nutriments assimilables par les plantes. Autre conséquence négative du tassement: le danger d’érosion, dû au fait que la pluie pénètre moins bien et ruisselle en surface.

Le tassement peut se produire dans la couche superficielle du sol, ou plus profondément, sous la semelle de labour. La couche superficielle peut être décompactée grossièrement par le travail du sol, mais seuls les organismes vivants du sol peuvent lui donner une bonne structure durable. L’élimination des dégâts dans la couche profonde au moyen de machines est plutôt contreproductive et provoque un nouveau tassement. Ce dont on a encore besoin en pareil cas, c’est des organismes vivant en profondeur, dont l’activité mélange le sol et y crée des cavités, et de plantes qui s’enracinent profondément.

La portance est décisive

Comment l’agriculteur peut-il veiller à ce qu’aucun tassement ne se produise ? « Le b-a ba, c’est la stimulation de la portance du sol », explique Andreas Chervet, du Service de la protection des sols du canton de Berne. Cela requiert la formation de complexes argilo-humiques et une bonne structure granuleuse. On peut obtenir les deux grâce à des apports de matière organique et en atteignant une valeur pH du sol supérieure à 6,2. La réduction du travail du sol est également favorable à la portance de ce dernier, par exemple, dans le meilleur des cas, en pratiquant le semis direct. En outre, avant d’acheter une nouvelle machine, il faut réfléchir à la pression exercée sur le sol. Lors de la décision d’achat, il faudrait tenir compte également d’aspects tels que le poids et les pneumatiques, et la présence éventuelle d’autres mesures permettant de diminuer la charge au sol de la machine ou de l’outil, comme des roues de culture ou des essieux supplémentaires.

Estimation du risque

L’outil en ligne « Terranimo », mis à disposition gratuitement par la HAFL, calcule le risque d’un tassement du sol lors de l’utilisation de différentes machines. La page web offre deux variantes. Dans la version « light », il suffit d’indiquer la charge des roues, la pression des pneus, la teneur en argile et le degré d’humidité du sol pour obtenir rapidement et facilement un diagramme de décision. La version « expert » permet de choisir divers outils, machines et remorques et de spécifier les caractéristiques des pneus via indication de leur dimension et du fabricant. Elle permet aussi de décrire la texture et le degré d’humidité du sol de façon plus précise. Ce qui permet une évaluation plus précise que dans la version « light ».

www.terranimo.ch

Planifier le travail au champ

Le danger de tassement est particulièrement élevé lorsque l’on utilise des machines lourdes. On pensera, par exemple, à la récolte des betteraves ou à l’épandage des engrais de ferme. Pour ce qui est des betteraves, Andreas Chervet conseille de ne pas rouler avec une trémie surchargée, mais de s’arrêter plus souvent pour vider au bord du champ. « S’agissant de l’épandage du purin, il est favorable de placer la bossette à purin au bord du champ et de travailler avec un système de tuyaux », ajoute-t-il. Et de compléter en soulignant qu’il faut éviter de passer plusieurs fois au même endroit au commencement du champ.

Avant un travail au champ, l’agriculteur a la possibilité d’estimer très facilement le risque de tassement actuel avec l’outil en ligne « Terranimo », mis à disposition gratuitement par la HAFL. Après avoir indiqué la charge des roues, la pression des pneus, la teneur en argile et le degré d’humidité du sol, on obtient de l’outil un diagramme de décision (lire l’encadré). Plus ces quatre facteurs sont faibles, moins il existe de risque de tassement.

Erosion pluviale et battance

L’érosion pluviale et la battance du sol sont souvent dues à la combinaison de plusieurs facteurs. Il va de soi que la topographie, l’intensité des précipitations et le type de sol jouent un rôle, les sols silteux étant les plus menacés. D’autres facteurs favorisant l’érosion et la battance sont l’absence ou l’insuffisance de la couverture végétale et le tassement du sol.

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Andreas Chervet (à gauche), du Service de la protection des sols du canton de Berne, évalue différents types de sol à l’aide du test à la bèche.

L’érosion pluviale et la battance sont directement et indirectement dommageables aux plantes: la terre et ses précieux nutriments ainsi que les produits phytosanitaires sont lessivés, la structure du sol est endommagée, les plantes sont recouvertes et les semences doivent lever dans de mauvaises conditions. Les cultures les plus menacées sont les cultures en rangs, comme le maïs et la betterave, ainsi que les pommes de terre et les autres cultures buttées.

« Méthode toujours vert »

Les mesures valables sur la durée pour empêcher l’érosion pluviale et la battance sont les mêmes que celles qui favorisent la portance du sol: une structure du sol stable, l’apport de matière organique, une valeur pH minimale de 6,2 et une faible intensité du travail du sol. Concrètement, l’agronome Andreas Chervet recommande la « méthode toujours vert ». En d’autres termes, une couverture permanente du sol via des mesures comme le semis direct et les cultures intercalaires. Ces mesures empêchent le lessivage de la couche superficielle et l’enracinement permanent stabilise le sol. Sinon, qu’est-ce qui est encore efficace pour prévenir l’érosion ? « Il ne faudrait pas installer de cultures buttées dans les pentes avec des sols silteux. On peut aussi couper la longueur de la pente en installant des haies ou des bandes de jachère fleurie» , explique l’agronome. Pour la culture des pommes de terre, il y a également la possibilité d’utiliser le « Dyker ». Lors du buttage, cet outil creuse de petits trous et forme des micro-barrages dans les interbuttes, afin d’absorber et de garder l’eau. D’après Andreas Chervet, on peut également agir avec beaucoup d’efficacité lors de la préparation du lit de semence. Dans un sol finement grumeleux, la structure sera détruite en cas de forte pluie. « Un lit de semence grossier convient aussi aux céréales, car il est moins sensible à la battance », ajoute-t-il. Pour évaluer rapidement la structure du lit de semence, il faut procéder au test de la pièce de cent sous. S’il n’y a qu’un faible nombre de grumeaux supérieurs à la taille d’une thune, c’est que le lit de semence est trop fin.

« La méthode toujours vert a un impact positif sur la structure et la vie du sol. »

Andreas Chervet, Service de la protection des sols du canton de Berne

Les travailleurs du sous-sol

Le sol héberge une myriade d’êtres vivants, qui sont les seuls producteurs de terre fertile. Les microorganismes créent de l’humus, veillent à une bonne structure du sol et recyclent les nutriments. Les animaux de plus grande taille, comme les lombrics, broient les grosses particules de matière organique et les mélangent avec le sol. Ce dernier est ainsi bien aéré et absorbe l’eau plus facilement. Les plus petits ouvriers du sol sont surtout des champignons et des bactéries. Ils sont notamment responsables de transformer la matière organique et de la rendre biodisponible sous forme de nutriments pour les plantes. Mais les organismes qui peuplent le sol sont fragiles et ne se sentent pas bien du tout dans des sols tassés, gorgés d’eau ou totalement asséchés. Ils n’apprécient pas non plus un travail du sol trop intensif. Dans les terres cultivées, un pH situé entre 6,2 et 7,5 est idéal pour leur activité.

Nourrir la vie du sol

Comment peut-on augmenter l’activité des organismes vivant dans les sols agricoles ? La réponse d’Andreas Chervet: « Le principe ‹toujours vert› est valable aussi dans cette perspective. » Les plantes favorisent la vie du sol grâce aux excrétions de leurs racines, qui servent de nourriture. Les restes de récolte et les engrais verts sont également consommés et mis en valeur. Ce qu’il faut viser, c’est un travail du sol de faible intensité, afin de préserver sa structure. « Le semis direct a l’avantage de pas déranger du tout la vie des organismes du sol et leur environnement, qui n’est plus détruit régulièrement par les outils de culture », ajoute Andreas Chervet. Il souligne par ailleurs que la diversité des espèces d’organismes du sol est la plus élevée avec le semis direct. Or, cette diversité est également favorisée par la diversité des plantes cultivées. En l’occurrence, ce sont surtout les mélanges d’engrais verts qui sont intéressants. Les diverses espèces de plante favorisent, d’une part, les champignons mycorhiziens, qui aident surtout les plantes à absorber le phosphore et l’eau. D’autre part, les légumineuses apportent de l’azote dans le sol via les rhizobactéries de leurs nodules. Enfin, une rotation variée fait aussi du bien à l’activité du sol. 

Auteure   Verena Säle, Revue UFA, 8401 Winterthour

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