La saison d’alpage 2023 a été bonne, la population de loups est régulée. L’économie alpestre suisse a-t-elle passé le cap ?
C’est le cas : 2023 a été une bonne année pour la plupart des alpages et j’en suis heureux. En effet, la végétation y a poussé en abondance, produisant un fourrage de bonne qualité. Il en va de même de la fabrication des fromages d’alpage, ce dont nous sommes donc aussi satisfaits.
En revanche, en ce qui concerne le loup, le bilan est mitigé : certes, nous avons accueilli avec soulagement les dispositions de la nouvelle ordonnance sur la chasse permettant une régulation proactive des loups ; mais ensuite, les organisations environnementales ont freiné la régulation des meutes pendant l’hiver 2023 - 2024, ce que nous regrettons vivement. De plus, la chasse au loup est techniquement très exigeante, car il s’agit d’un animal intelligent qui ne se laisse pas facilement débusquer par les gardes-faune.
Donc, seule une petite partie des loups pouvant être tirés a été abattue et il est difficile d’en estimer l’effet pour cet été. A l’heure actuelle, nous ne tablons pas sur un allègement important pour l’économie alpestre. Il est très important que les tirs préventifs puissent se poursuivre à l’avenir.
« L’approvisionnement en eau des alpages nous préoccupe. »
Les alpages sont confrontés à une autre difficulté : le dérèglement climatique. Comment les exploitations alpestres seront-elles dès lors approvisionnées en eau à l’avenir ?
L’approvisionnement en eau des alpages est effectivement un sujet de préoccupation : il y aura de moins en moins de neige en hiver et les périodes de sécheresse seront de plus en plus longues en été. Ainsi, les capacités de stockage et d’approvisionnement à l’alpage doivent être adaptées.
Une tâche de la SSEA est de sensibiliser les alpagistes à ce sujet et de leur montrer les possibilités de soutien, par exemple par le biais de l’ordonnance sur les améliorations structurelles. Par ailleurs, de nombreuses exploitations alpestres ont déjà adapté leurs infrastructures et peuvent ainsi servir d’exemple.
Cependant, les projets concernant les infrastructures étant souvent des processus longs et onéreux, l’adaptation requise prendra du temps.
En 2023, l’UNESCO a inscrit la saison d’alpage sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité. Mais qu’est-ce que cela apporte aux alpagistes ?
Nous remplissant de fierté, cette reconnaissance internationale rend avant tout hommage aux immenses contributions des alpagistes au cours des siècles passés et de nos jours : une gestion adaptée aux réalités du terrain, la transmission de connaissances et de la culture alpestre ainsi que beaucoup de dur labeur ont permis de créer un espace de vie unique dans les Alpes.
Grâce à la reconnaissance de l’UNESCO, des projets directs qui renforcent l’économie alpestre peuvent aussi être financés par la Confédération. La SSEA est très motivée à s’atteler à la tâche en s’investissant pour la mise en œuvre.
Entretien : Stefan Gantenbein