La Station ornithologique suisse de Sempach, une fondation dédiée à l’étude et à la protection des oiseaux, avait acquis entre autres, lors d’une mise de faillite en 2017, deux parcelles agricoles soumises à la loi fédérale sur le droit foncier rural. Elle avait présenté à l’autorité cantonale une autorisation d’acquisition, au motif que cet achat servirait à protéger les hiboux petits-ducs qui y vivaient et à préserver l’habitat de cette espèce menacée.
L’autorité compétente avait d’abord refusé, parce que la Station ornithologique n’était pas exploitante à titre personnel, avant que le tribunal cantonal, saisi de l’affaire, ne décide que l’achat pouvait être autorisé. En vertu de la LDFR, l’autorisation peut en effet être accordée, malgré l’absence d’exploitation à titre personnel, si l’achat sert, comme dans le cas présent, à préserver « un objet relevant de la protection de la nature ».
L’Office fédéral de la justice avait alors recouru devant le Tribunal fédéral. Il estimait en effet que l’objet relevant de la protection de la nature doit être attaché durablement à l’immeuble agricole considéré. Par ailleurs, l’objet doit être « digne de protection », ce qui n’était en l’occurrence pas le cas, puisque l’habitat des hiboux petits-ducs ne se trouvait pas dans une zone (naturelle) protégée et que les parcelles considérées ne bénéficiaient d’aucune protection particulière.
Le Tribunal fédéral a estimé qu’un animal et son habitat peuvent parfaitement représenter un « objet relevant de la protection de la nature ». Le hibou pe-tit-duc est un oiseau protégé par la loi sur la chasse et considéré comme très menacé par l’Office fédéral de l’environnement. Son habitat, situé sur les deux parcelles considérées, est donc digne de protection.
Mon-Repos a souligné en l’occurrence que l’octroi de l’autorisation d’acquisition n’est pas conditionné au fait que l’objet est digne de protection ou situé dans une zone protégée. La protection du hibou petit-duc est par ailleurs compatible avec l’exploitation agricole (extensive), si bien que l’autorisation devait être délivrée à la Station ornithologique suisse. Le recours de l’Office fédéral de la justice a donc été rejeté.
Arrêt 2C_1069 / 2020 du 27.10.2021