Suite à la diminution du nombre d’exploitations agricoles, le pourcentage de surfaces en fermage augmente constamment. Alors que la part des surfaces en fermage s’élevait à 37 % en 1980, cette proportion est passée à 43 % en 2005 pour atteindre 45 % en 2016. La tendance est claire.
Actuellement, on estime qu’en Suisse, près 50 % de la surface agricole n’appartient pas à des agriculteurs actifs mais à des privés, à des institutions publiques ou à des entreprises, par exemple. Inversement, la part des surfaces agricoles détenues en propriété par des agriculteurs diminue elle aussi constamment. Suite à cela, les agriculteurs actifs sont plus dépendants des bailleurs.
Les surfaces agricoles étant une denrée rare et les transactions s’opérant à des prix élevés, les agriculteurs sont souvent soulagés de pouvoir opter pour la location. En effet, malgré des indemnités de fermage parfois conséquentes, la location permet de s’agrandir sans devoir immobiliser d’énormes moyens financiers. Alors que le pourcentage des terres affermées augmente, celui des entreprises agricoles affermées diminue. En 2016, en Suisse, sur un total de 52 263 exploitations, on comptait 8938 entreprises agricoles affermées ( 17,1 % ) alors qu’on en dénombrait encore 10 473 en 2010.
Les dispositions de base concernant le bail à ferme agricole sont mentionnées dans la loi fédérale sur le bail à ferme agricole ( LBFA ) et l’ordonnance sur les fermages ( OFerm ).
Principes de base
Champ d’application de la LBFA
La LBFA s’applique aux surfaces et aux entreprises agricoles situées en dehors de la zone à bâtir. Les parcelles en fermage mixtes incluant une part de terrain en zone à bâtir sont également assujetties à la LBFA lorsqu’un seul contrat de bail est conclu pour l’ensemble de la surface. Pour qu’un terrain soit soumis à la LBFA, il faut que la parcelle en question soit supérieure à 25 ares pour les terres cultivées / les prairies et supérieure à 15 ares pour les vignes. Lorsqu’un fermier loue plusieurs petites parcelles au même propriétaire, ces dernières s’additionnent les unes aux autres.
Bail CO
Les parcelles situées entièrement en zone à bâtir et celles qui n’atteignent pas la surface minimale requise ne sont pas assujetties à la LBFA. Ce genre de location est régi par le code suisse des obligations ( CO ). Dans le cas des baux régis par le CO, la durée de bail est d’un an seulement et le délai de résiliation de six mois.
Contrat
Contrat de bail
Il y a contrat de bail à partir du moment où le bailleur loue au fermier une parcelle ou une entreprise agricole contre rémunération. Le fermage peut être versé sous forme d’une rétribution financière, de produits agricoles mais également en échange de prestations. Ni la LBFA ni le CO ne mentionnent des dispositions concernant la forme du contrat de bail. Un contrat de bail peut par conséquent être tacite, oral ou écrit. Contrairement à un avis largement répandu, les contrats de bail oraux ont la même portée juridique que les contrats écrits, à partir du moment où leur existence peut être prouvée.
Prêt à usage
Lorsqu’un agriculteur utilise un terrain agricole, indépendamment de la surface de ce dernier et de la zone où il se trouve, sans s’acquitter d’un fermage sous une forme quelconque, on est en présence d’un prêt à usage régi par le CO et non d’un bail à ferme. L’exploitant, également appelé emprunteur, peut utiliser l’objet aussi longtemps que le propriétaire, appelé prêteur, lui en accorde la possibilité. Lorsqu’aucune durée n’est convenue, le prêteur peut dissoudre le rapport entre les parties au terme de chaque utilisation, soit après chaque coupe dans le cas d’une prairie et après la récolte pour les terres cultivées.
Le prêt à usage est une solution fréquemment utilisée pour les terrains à bâtir. Dans le cas du prêt à usage comme dans celui des baux régis par le CO, les exploitants ne bénéficient pas du droit de préemption.
Durée du contrat
Les durées de bail minimales sont les suivantes :
- parcelles :six ans pour le premier bail et six ans pour chaque renouvellement
- entreprises agricoles :neuf ans pour le premier bail et six ans pour chaque renouvellement
Les durées de bail plus courtes ne sont légales que si les autorités cantonales responsables ont donné leur accord.
Affermage par parcelles
L’affermage par parcelles d’un objet précédemment considéré comme une entreprise agricole est autorisé si : … l’affermage permet d’améliorer la structure d’autres entreprises, … les héritiers au bénéfice d’un droit de préemption ou d’attribution ( descendants, frères et sœurs, enfants de frères et sœurs ) donnent leur accord, … le conjoint donne son approbation.
Fermage
Le montant du fermage autorisé est stipulé dans l’ordonnance sur les fermages. Dans le cas de l’affermage d’une entreprise agricole, le montant du fermage est contrôlé par l’autorité compétente. Cette prescription ne s’applique pas à l’affermage par parcelles. Dans ce cas, le recours contre un fermage abusif doit être déposé dans les deux ans qui suivent le début du contrat de bail.
Les prestations annexes comme la livraison de biens en nature, le bois de chauffage ou la mise à disposition d’eau provenant d’une source privée ne sont pas incluses dans le fermage mais doivent faire l’objet d’une rétribution séparée.
Devoirs
Exploitation
Le fermier doit exploiter la chose affermée avec soin et maintenir durablement la productivité du sol. Il peut recourir à des entreprises de travaux par tiers, des membres de la famille, des employés ou des membres d’une communauté à laquelle il appartient pour effectuer des travaux d’exploitation. La sous-location est interdite. Le fermier ne peut par conséquent pas louer la chose affermée à un tiers sans l’accord du bailleur.
Entretien/investissements
Le bailleur doit remettre au fermier la chose affermée dans un état qui permet une exploitation normale. Les réfections majeures (remplacement d’un chauffage ou d’une toiture p.ex.) incombent au propriétaire. Le fermier doit quant à lui se charger des petites réparations (p. ex. remplacement des vitres cassées, tuiles isolées, travaux d’entretien aux chemins ou aux clôtures).
Le fermier n’est autorisé à apporter à l’objet loué des rénovations et des changements dépassant le cadre de l’entretien ordinaire qu’avec l’approbation écrite du bailleur. En l’absence d’approbation écrite, le fermier doit s’attendre le cas échéant à ne pas être dédommagé pour les investisse-ments réalisés.
Résiliation
Délai de résiliation
La résiliation doit toujours se faire par écrit, même en cas de bail oral. Le délai de résiliation est d’un an au minimum. Une résiliation trop tardive fait office de résiliation pour la prochaine échéance légale. En présence d’un contrat de bail à durée déterminée, la relation contractuelle prend fin à la date d’échéance mentionnée dans le bail. La résiliation n’est pas nécessaire.
Résiliation anticipée
Dans les cas exceptionnels comme le non-respect de l’obligation d’exploitation, le bailleur a la possibilité de résilier le contrat de bail de façon anticipée, avec un délai de six mois pour une échéance au printemps ou à l’automne. Lorsque le fermier conteste la résiliation, un procès est généralement inévitable.
Prolongation du bail
Le fermier doit déposer une demande de prolongation de bail auprès du tribunal de première instance dans un délai de trois mois après réception de la résiliation ( dans le cas d’un contrat à durée déterminée au moins neuf mois avant l’arrivée à échéance ). Il revient au bailleur de prouver qu’une telle prolongation n’est pas supportable. Une prolongation du bail varie de trois à six ans. Une prolongation de bail est insupportable lorsque… … le fermier a contrevenu à ses obligations légales ou contractuelles ; … le fermier est insolvable ; … le bailleur, son conjoint ou un membre de la famille proche désire exploiter lui-même l’objet du bail ; … le maintien de l’entreprise agricole ne se justifie pas ; … l’objet loué se trouve en zone à bâtir.
Retard de paiement
Lorsque le fermier est en retard pour le paiement, le bailleur peut l’avertir par écrit que le contrat sera résilié s’il ne s’acquitte pas des montants impartis dans un délai de six mois.
Changement de propriétaire
La vente ne rompt pas le bail
En cas de changement de propriétaire, ce dernier doit poursuivre le bail de manière inchangée. La LBFA permet à l’acquéreur de résilier le contrat de bail de manière anticipée lorsqu’il a besoin de la chose affermée dans les buts suivants :
- pour des constructions ;
- à des fins d’utilité publique ;
- pour l’exploiter en propre.
La résiliation doit intervenir dans les trois mois qui suivent la conclusion du contrat d’achat. Le contrat de bail sera résilié dans un délai d’un an pour une échéance au printemps ou à l’automne. Le bailleur doit dédommager le fermier pour la période qui s’étend entre la résiliation anticipée et l’échéance initiale du bail. Le fermier ne devra quitter la chose affermée qu’après avoir reçu le dédommagement convenu ou qu’une fois que le versement du dédommagement est assuré.
Une résiliation anticipée de ce type peut constituer un cas de force majeure pour le fermier, qui peut par conséquent demander au juge une prolongation de bail de six mois à deux ans.
Terres prises en fermage et remise d’exploitation
La LBFA stipule que le reprenant doit informer par écrit le bailleur de tout changement d’exploitant. Si le bailleur ne s’y oppose pas dans les trois mois après réception, le reprenant devient titulaire légal du bail.
En l’absence de documents écrits, le successeur reprend l’exploitation de la parcelle / de l’entreprise louée. Dès lors que le bailleur accepte l’indemnité de fermage, un nouveau contrat de fermage est conclu avec de nouvelles échéances. Le bailleur peut toutefois refuser le nouvel exploitant après avoir constaté un changement dont il n’a pas été averti.
Ces dispositions s’appliquent aussi lorsqu’un agriculteur remet une entreprise ou confie l’exploitation de cette dernière à son épouse moins âgée parce qu’il a atteint l’âge de la retraite.
Droit de préemption du fermier
Le fermier dispose d’un droit de préemption sur l’objet loué lorsque le bail a été reconduit pour un deuxième terme selon la LBFA, soit après la 6 e année pour les parcelles, et après la 9 e année pour les entreprises agricoles, et ce quelle que soit la durée de bail initialement convenue. Le fermier ne peut pas faire usage de son droit de préemption à un prix préférentiel. Le droit de préemption intervient en second rang, après celui de la parenté, même si ces derniers n’exploitent pas euxmêmes le bien concerné ( le droit de succession prévaut et le droit de préemption n’intervient pas ).
Check-liste Bail à ferme
Début de bail
- Régler les modalités du fermage
- Conclure un contrat écrit
- Préparer le protocole de reprise
- Dans le cas d’un bail à ferme portant sur une entreprise agricole, le faire approuver par le Service de l’agriculture
Pendant la durée du bail
- Verser les fermages dans les délais
- Assurer l'entretien et les réparations
- Etre soigneux
- Définir les investissements nécessaires et fixer le montant du dédommagement en fin de bail
- Tenir le bailleur informé du mode d’exploitation
- Protection contre la résiliation en cas de changement de propriétaire
- Envisager le droit de préemption
En fin de bail
- Respecter les délais de résiliation
- Envisager la prolongation de bail
- Régler la restitution de la chose affermée
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