Une promeneuse passe devant une porcherie. L’agriculteur est juste en train de nettoyer la place extérieure. Il salue la promeneuse qui lui répond : « Ici, ça sent le cochon ». La promeneuse et l’agriculteur sont alors déjà en pleine communication. Le message envoyé par l’émetteur (la promeneuse) peut être interprété de différentes manières par le récepteur (l’agriculteur).
C’est surtout le message perçu par le récepteur qui est important. La perception ne se limite pas aux mots prononcés. Le langage corporel, l’expression du visage et le ton de la voix font partie intégrante du message. Ce derniner comporte quatre dimensions distinctes. Le « concept des quatre oreilles » de Friedemann Schulz von Thun illustre ces dimensions.
Une bonne communication commence chez l’émetteur
La promeneuse a envoyé un message qui compte quatre dimensions distinctes. Il y a la dimension des faits, c’est-à-dire « Ça sent, ici ». Le message a aussi la dimension d’appel, soit « Nettoyez donc correctement votre porcherie, ça sent mauvais ». A travers la dimension de la révélation de soi, la promeneuse dévoile qu’elle s’aperçoit tout de suite de l’odeur et qu’elle est en mesure de l’attribuer aux porcs. Par la dimension des relations, elle montre qu’elle souhaite dominer l’agriculteur : « Je pense être supérieure à vous, donc je dois vous expliquer les choses ».
Cinq conseils en vue d’une bonne communication
- J’en suis conscient : je communique toujours !
- Je suis un ambassadeur dans / pour mon métier.
- Je répète volontiers plusieurs fois mon message.
- J’ai aussi le droit de dire : « Non », « Je n’ai pas le temps », « Je ne sais pas ».
- Je suis conscient que mon interlocuteur a aussi le droit d’avoir son propre avis.
Le récepteur écoute avec « quatre oreilles »
L’agriculteur répond de la manière suivante à l’affirmation de la promeneuse : « Oui, c’est vrai, le lisier de porc sent assez fort. » Apparemment, l’agriculteur a perçu l’affirmation de la promeneuse avec l’oreille des faits. Selon le modèle de Schulz von Thun, le récepteur enregistre toujours les messages avec une des « quatre oreilles ». L’oreille d’appel n’entend que le reproche (« Elle souhaite que je nettoie la porcherie plus souvent, pour que cela sente moins mauvais »). L’oreille de la révélation de soi fournit des informations sur l’interlocutrice (« Il s’agit sûrement d’une citadine qui a un odorat trop sensible »). L’oreille des relations entend surtout le côté moralisateur (« Elle croit devoir m’expliquer les choses alors qu’elle n’en a aucune idée ») et l’oreille des faits n’entend que l’information factuelle (« Elle me dit que ça sent le cochon »).
L’émetteur et le récepteur sont sur des niveaux différents
Ce n’est pas la première fois que la promeneuse a été dérangée par l’odeur des porcs en passant devant la ferme. Elle est persuadée que la porcherie n’est pas nettoyée assez souvent. Et comme elle aperçoit l’agriculteur, elle ne peut s’empêcher de faire un commentaire. Enervée, elle a voulu aborder le sujet avec lui (« Ici, ça sent le cochon »). Elle souhaitait émettre un appel mais a en fait émis un message qui manque de clarté. L’agriculteur a réceptionné ce message avec l’oreille des faits mais pas avec l’oreille des appels.
En cas de doute, poser la question
Outre la perception différente des messages échangés entre l’émetteur et le récepteur, d’autres dérangements peuvent venir brouiller la communication, comme l’explique Tanja Pfannmüller, médiatrice et coach. Selon cette dernière, ces dérangements sont surtout dus au bruit, à un langage peu clair, ambigu ou mal interprété, à la distraction ou à une attitude négative vis-à-vis de l’information. « Il ne suffit pas d’être convaincu d’avoir tout dit correctement. Lorsque mon message n’est pas perçu par le récepteur comme je le souhaite, tous mes efforts sont vains. » Sachant qu’il est important que le récepteur comprenne le message correctement, il vaut la peine de le vérifier en posant la question : « Est-ce que je me suis exprimé clairement ? »
Se contrôler soi-même
En tant que récepteur d’un message, il faut avoir conscience de l’oreille avec laquelle on vient d’écouter le message concerné. « Si c’est par exemple mon oreille des relations qui est très développée, j’ai constamment l’impression d’être agressé et de devoir me justifier. Or, mon interlocutrice ne cherche peut-être qu’à me transmettre une information factuelle. »
Soutien non verbal
Tanja Pfannmüller estime que la communication est mauvaise lorsqu’elle est mensongère, perturbante, voire irrespectueuse. « Une pseudo non-communication n’est pas appropriée non plus. C’est le cas par exemple lorsqu’une personne affirme : « Mais je n’ai rien dit de mal ! » tout en exprimant par son aptitude corporelle, son regard et sa voix tout le mépris qu’elle éprouve pour son interlocuteur. » Le linguiste Schulz von Thun applique le terme « message incohérent » à ce type de situation. Parfois, les éléments linguistiques et non linguistiques d’un message se complètent bien et se renforcent mutuellement. Parfois, en revanche, ils se contredisent et peuvent alors avoir un rôle perturbateur.
Nous communiquons sans cesse, consciemment ou pas
Ce qui est problématique, c’est que la communication peut aussi se dérouler de manière inconsciente. « La communication intervient dès que deux êtres vivants se rencontrent », affirme Tanja Pfannmüller avant de préciser : « Par notre attitude corporelle, un regard ou un son, nous « affirmons » déjà énormément de choses sans même avoir prononcé un seul mot. »
Eviter les malentendus
Mais comment éviter un malentendu comme dans le cas du promeneur évoqué plus haut ? Tanja Pfannmüller recommande d’opter pour une communication claire : « Il faut s’exprimer de manière explicite, en s’adressant de manière directe à son interlocuteur. » Des affirmations telles que « Je ne sais pas » ou « Pour l’instant, je n’ai pas le temps » sont, par exemple, une manière de communiquer clairement. Selon l’experte en communication, une aptitude respectueuse est essentielle. L’attention ne doit pas être focalisée sur l’âge, le sexe ou l’orientation politique de l’interlocuteur mais sur l’être humain, avec ses peurs, ses soucis, ses espoirs et ses souhaits.
Savoir arrêter
Il arrive parfois que l’interlocuteur que l’on a en face de soi campe sur sa position ou qu’il devienne désagréable voire agressif. « Il se peut que cela ne soit pas du tout lié à la personne rencontrée ou à la thématique abordée, mais à d’autres facteurs », affirme Tanja Pfannmüller. « Une communication appropriée ne produit pas toujours les résultats escomptés, c’est un fait. La meilleure solution consiste alors à rester aimable et à quitter les lieux. » Une meilleure occasion se représentera certainement ultérieurement.
Données personnelles
Tanja Pfannmüller est coach et médiatrice pour les personnes du milieu rural. Outre son engagement auprès du Réseau médiation dans l’espace rural (www.hofkonflikt.ch), elle propose des cours de coaching (www.leenan.net ; hallo@leenan.net) et soutient les femmes travaillant dans l’agriculture à travers un groupe facebook.