Les infections de la mamelle sont généralement occasionnées par des bactéries, mais aussi par des virus, des champignons ou des parasites. Ces agents pathogènes pénètrent dans la mamelle via le canal du trayon. Toute infection ne provoque cependant pas une mammite visible de l’extérieur. Des bactéries pénètrent constamment dans la mamelle, puis disparaissent sans qu’on le remarque.
Système immunitaire inné
Une mammite associée à des symptômes cliniques clairs ne survient qu’au moment où la pression infectieuse à l’extrémité du trayon est supérieure à la capacité du système immunitaire de la mamelle. Dans la mamelle, seule l’immunité innée (non spécifique) opère, contrairement à ce qui est le cas dans le reste du corps, où l’immunité innée et l’immunité acquise (spécifique) interviennent. L’immunité innée n’agit pas de façon spécifique, mais réagit en revanche rapidement aux agents pathogènes entrants. Contrairement à l’immunité acquise, qui protège durablement l’animal des infections récurrentes (récidives), l’immunité innée ne dispose pas de « mémoire ». La mamelle contient des molécules de reconnaissance capables de se fixer sur un large spectre d’agents pathogènes. Ces molécules identifient les agents pathogènes entrants et déclenchent une réaction immunitaire. Le « message » est transmis à l’ensemble de l’organisme à l’aide de substances messagères. Il s’ensuit une accumulation de cellules immunitaires dans la mamelle, afin de lutter contre les agents pathogènes. L’augmentation du taux de cellules somatiques détectée à l’aide du test de Schalm atteste précisément la présence accrue de cellules du système immunitaire qui viennent en aide à la mamelle. Lorsque les tissus mammaires sont par exemple infectés par des toxines d’E. Coli, des millions de cellules affluent en moins de deux heures dans la mamelle.
Fluctuations
Les taux cellulaires augmentent et diminuent de façon cyclique. Plusieurs études indiquent qu’elles sont plus élevées en été que lorsqu’il fait froid. Il est intéressant de constater que les observations réalisées dans des pays réputés pour ne pas enregistrer des températures très élevées, comme le Canada et la Grande-Bretagne, corroborent aussi cette constatation. Les experts estiment que les fluctuations enregistrées au niveau des taux cellulaires sont dues à plusieurs facteurs. Elles résultent d’une part des intrusions d’agents pathogènes dans la mamelle. D’autre part, des études sont arrivées à la conclusion qu’il existe aussi des facteurs « spécifiques aux vaches » comme l’âge, le stade de lactation ainsi que le stress métabolique ou physiologique.
Stress thermique
Le niveau de production laitière d’une vache est étroitement lié aux nutriments ingérés. Le métabolisme des nutriments et la production laitière génèrent de la chaleur, ce qui aide la vache à stabiliser sa température corporelle dans un environnement froid. Plusieurs relevés climatiques indiquent qu’en Suisse, la température ambiante a augmenté de 2° C depuis 1864. La température annuelle moyenne est également plus élevée (voir graphique). Des analyses montrent que la production laitière des vaches Hostein s’est accrue de 88 % entre 1970 et 2016. En présence de températures ambiantes plus élevées, les vaches doivent trouver un moyen pour dégager davantage de chaleur. L’organisme consomme aussi de l’énergie pour dégager cette chaleur. L’énergie utilisée fait alors défaut à l’organisme et aux cellules mammaires pour la défense immunitaire et la production laitière. Plusieurs études prouvent que le stress thermique a un impact négatif sur la défense immunitaire, ce qui peut se traduire par un risque accru de mammite.
Quand l’été arrive…
On sait que l’environnement de la vache a un impact considérable sur la santé de la mamelle. Les températures extérieures et le taux d’humidité supérieurs qui prévalent en été assurent des conditions optimales pour la prolifération des agents pathogènes, ce qui concourt à accroître la pression infectieuse et, par conséquent, le risque de mammites cliniques en été. Dès qu’un troupeau est affecté par de fréquentes mammites (plus de 2 % par mois) ou par un taux cellulaire élevé, des échantillons de lait devraient être prélevés pour déterminer les principaux agents pathogènes. Le vétérinaire d’exploitation définit la procédure à suivre. Il faut aussi faire contrôler l’installation de traite par un spécialiste. Sachant que les agents pathogènes pénètrent généralement dans la mamelle via le canal du trayon, il convient d’accorder une grande attention à l’état de du trayon.
Une litière propre
La propreté des vaches et l’hygiène des logettes sont un élément encore plus essentiel en été. Le choix de la litière constitue souvent un défi et devrait être étudié avec le vétérinaire d’exploitation. La température de la litière s’adapte toujours à la température extérieure, raison pour laquelle une litière de qualité irréprochable est primordiale. Le pH de cette dernière peut aussi être évalué. A ce sujet, il convient de rappeler que certains agents pathogènes se multiplient également en présence d’un pH alcalin. C’est par exemple le cas de Klebsiella pneumoniae, qui se développe jusqu’à un pH de 9. En été surtout, il convient de réduire la densité d’occupation à l’étable.
Eau et fourrage
L’approvisionnement en eau et la qualité du fourrage devraient être analysés précisément, car ces facteurs ont un impact décisif sur la santé de la mamelle. L’eau soutient le corps dans son activité de thermorégulation, contribue au maintien de plusieurs fonctions corporelles importantes et est une composante essentielle du lait. Le lait se compose d’environ 87 % d’eau. Les vaches devraient toujours avoir accès à l’eau et cette dernière devrait être fraîche et propre.
La qualité et la distribution du fourrage sont d’autres aspects importants. Un fourrage qui a chauffé est moins bien consommé, entraînant une baisse de l’apport en énergie. Diverses études indiquent que les vaches ingèrent moins de fourrage de base au début d’une phase de stress thermique, mais qu’elles consomment toujours assez de concentrés au DAC (distributeur automatique de concentrés). Il arrive alors que la production laitière chute. Dans un tel cas de figure, augmenter encore les quantités de concentrés n’est pas une solution judicieuse. Il faudrait plutôt faire analyser la ration par un spécialiste en alimentation. En été, la ration devrait être distribuée au moins deux fois par jour et être repoussée plusieurs fois en cours de journée. Selon des analyses réalisées par Agroscope, en été, les vaches préfèrent manger pendant la nuit, lorsque les températures sont moins chaudes. L’aliment moisi contient des mycotoxines, ce qui a un impact très négatif sur le système immunitaire des animaux.
Toujours privilégier la prévention
Les mammites endommagent durablement les tissus mammaires. Des études effectuées par la Haute école de Hanovre concluent que les vaches présentant des taux cellulaires supérieures à 700 000 cellules / ml lors de trois contrôles laitiers consécutifs sont incurables. Les producteurs de lait devraient toujours axer la gestion du troupeau sur la prévention des numérations cellulaires élevées et des mammites.