Pour l’asperge, un bon approvisionnement en éléments nutritifs est crucial durant les trois premières années de culture. Les jeunes aspergeraies qui ne démarrent pas de manière optimale ont généralement un moins bon rendement les années suivantes et ne rattrapent jamais leur retard. Les plantes d’asperges fournissent habituellement leur plein rendement dès la troisième année, puis la productivité baisse au fil du temps. En raison de l’accumulation d’organismes nuisibles tels que phytophtora, fusariose et autres champignons, il n’est pas judicieux de cultiver deux fois de suite des asperges sur le même site. Une fréquence de retour de six à huit ans est recommandée.
Solution d’engrais utilisée de manière ciblée
La Jucker Farm à Rafz (ZU) cultive 20 ha d’asperges dont 17,5 ha sont en pleine production. 16 ha sont équipés d’une irrigation au goutte-àgoutte de 16 mm de diamètre et 50 cm d’espacement entre les goutteurs. L’irrigation s’effectue avec un réservoir d’engrais mobile et une station distributrice. La pluviométrie de la région est faible, avec environ 800 l / m 2 de précipitations annuelles. La pluie durant la période de végétation s’élève à 380 à 400 l / m 2 . Les sols sont des limons sableux avec du gravier, perméables. Les cultures sont irriguées en moyenne quatre à cinq fois dès la fin de la récolte, à raison de 20 l / m 2 par arrosage. En 2018, une année sèche, c’était même nettement plus. Le site limite naturellement le rendement. Le responsable d’exploitation a investi dans une irrigation au goutte-à-goutte il y a quelques années. Un bon calcul. « Le commerce des asperges marche bien, un tiers des asperges est vendu directement sur l’exploitation, le reste dans le commerce de détail. Nous voulons garantir l’approvisionnement et cherchons à obtenir des rendements élevés », explique Robert Curt, responsable de la production chez Jucker, où l’écologie compte et où les exigences des PER doivent être respectées. « Nous fertilisons en fonction des prélèvements effectifs. Notre facteur limitant étant le phosphore, nous avons cherché une méthode efficace autre que juste fertiliser par le sol », poursuit-il. Après la récolte, les asperges reçoivent une fumure de fond avec un engrais NPK à la carte de Landor. Le goutte-à-goutte apporte une solution d’engrais complémentaire (nitrate d’ammoniac 34 %, de MAP 12 / 60, de nitrate de magnésium et de nitrate de potasse 13.0.46). « La charge supplémentaire pour l’irrigation est amortie, les coûts de la fumure dans la culture d’asperges sont inférieurs à 2 %. Comme indiqué, des rendements élevés sont attendus. Le calibre fait le poids », conclut le responsable de la production, satisfait. Pour un démarrage optimal des jeunes plantations, l’exploitation mise sur des plantes vertes.
Sols légers
Les sols sableux et faiblement humifères avec une bonne circulation de l’eau sont idéaux pour obtenir de bons rendements et des asperges de haute qualité. Le pH devrait être neutre ; dans le cas contraire, un chaulage est indiqué. Les asperges vertes peuvent maintenant aussi être cultivées dans des sols lourds et argileux, mais une préparation adéquate du terrain est décisive. L’amélioration du site passe notamment par l’épandage de matière organique et l’incorporation de celle-ci dans le sol à la bonne profondeur.
Azote
L’azote sert à la formation du feuillage et à la production d’assimilats. En règle générale, la fumure s’effectue une semaine avant la fin de la récolte. Une fumure azotée excessive doit être évitée. La fumure doit être adaptée au peuplement, à la densité de plantes, au rendement et à la variété. Trop faible, elle entraîne des pertes de rendement et un vieillissement prématuré de l’aspergeraie ; excessive, elle ne conduit pas forcément à plus de rendement. Une fumure azotée excessive entraîne généralement un retard de la maturité ainsi que des pertes de rendement sous forme de baisse de qualité. Des fissures peuvent apparaître sur les variétés à pointe ouverte.
Dans la pratique, on travaille souvent avec de la cyanamide calcique Perlka. Outre l’effet de l’azote, Perlka a un effet phytosanitaire sur le sol et peut ainsi contrer la pression de champignons tels que le phytophtora. Son effet herbicide ne doit pas non plus être sous-estimé.
Phosphore
Il n’y a pas de période précise pour la fumure phosphatée, cet élément servant uniquement à la formation du rhizome. Il est préférable de choisir un phosphate soluble. La disponibilité du P du sol doit aussi être assurée. Cela nécessite une bonne aération, suffisamment d’humus et de calcaire ainsi que l’absence de tassement et d’eau stagnante. En cas de carence en P, les feuilles deviennent plus foncées ou rougeâtres. De nombreuses feuilles dépérissent aussi prématurément.
Prélèvements de N et P
Durant les trois premières années, les besoins en P pour le développement du rhizome sont élevés tandis que les exportations sont comparativement faibles. Des essais ont montré que jusqu’à 152 kg de P par ha sont emmagasinés pour le rhizome durant cette période. Les exportations par le biais des produits de récolte s’élèvent quant à elles entre 8 et 10 kg par hectare dès la quatrième année de culture. La situation est similaire pour l’azote. Durant les trois premières années, environ 140 à 160 kg N par hectare sont nécessaires tandis que les exportations sont faibles. Dès la quatrième année, 80 kg N par hectare sont nécessaires pour des prélèvements de 26 à 30 kg N. Ces valeurs ne sont qu’indicatives et doivent toujours être considérées en lien avec le potentiel de fourniture du sol et les exportations.
Potassium
Le potassium est important pour le rendement et la qualité. Il a aussi un effet important sur le goût typique de l’asperge. Il participe à la formation du tissu de soutien, aux processus métaboliques et au transport des glucides. Un approvisionnement suffisant en potassium améliore la résistance des plantes aux maladies et aux ravageurs ainsi que l’approvisionnement en eau. Les asperges sont tolérantes au potasse sous forme de chlorure.
Magnésium
Une carence en magnésium est généralement très voyante, les feuilles prenant une coloration jaune spécifique. Les performances de la photosynthèse diminuent alors nettement. La plante ne produit pas suffisamment de chlorophylle et seuls peu de glucides de réserve sont produits afin d’être stockés dans le rhizome. On peut généralement facilement remédier à un manque de magnésium. Cependant, les feuilles tombent si la carence n’est pas comblée. Il est très important de choisir la forme du magnésium selon le type de sol. On devrait travailler avec du magnésium soluble dans l’eau dans les sols lourds et du carbonate de magnésium dans les sols légers et filtrants.
Irrigation
Le régime hydrique occupe une place importante dans la culture de l’asperge. On assure ainsi une pousse régulière pour les assimilats. Dans certaines régions, il est judicieux d’irriguer après la récolte (voir encadré). Divers essais ont confirmé des gains mesurables. L’irrigation entraîne une augmentation du volume de stockage dans les racines et une vigueur accrue du rhizome au redémarrage. Des essais liés à la matière sèche ont mis en évidence une augmentation du volume de stockage et du pourcentage de racines fasciculées. Une augmentation du nombre de tiges n’a pas pu être prouvée. Par contre, des tiges plus épaisses ont été récoltées. Sur les sites très productifs, le vieillissement des aspergeraies a été réduit. Les systèmes d’irrigation au goutte-à-goutte ont fait leurs preuves. Si la culture est irriguée, il faut veiller à ajouter une solution nutritive contenant des engrais solubles.