Dans l’Agriculture de Conservation, les mesures préventives ont une place prioritaire. La protection des plantes par voie chimique ne doit être qu’un complément aux mesures préventives et limitée au strict nécessaire. Ainsi, on réduit les coûts et on diminue les effets indésirables sur les organismes du sol, sur les auxiliaires et sur la qualité de l’eau. Une bonne fertilité des sols, des éléments fertilisants disponibles en suffisance et une diversité des espèces végétales contribuent à des cultures saines.
Modification de la flore adventice
Par une mise en œuvre conséquente du semis direct, le lessivage des produits phytosanitaires et de leurs métabolites ainsi que des éléments fertilisants est réduit.
L’application du principe de non-perturbation du sol entraîne à terme une modification de la flore adventice, une diminution des espèces annuelles, une augmentation des espèces pérennes et une augmentation des graminées annuelles qui germent en surface. Les repousses de plantes cultivées et des mauvaises herbes établies peuvent nécessiter des stratégies de lutte adéquates. En valeur absolue, le nombre de mauvaises herbes diminue dans les systèmes en semis direct. Les mouvements de terre réduits au minimum diminuent la stimulation de la germination des graines de mauvaises herbes par la lumière. Le type et la forme des socs des éléments de semis direct exercent un effet d’intensité différente sur la terre qui se répercute sur l’abondance des mauvaises herbes. Les disques gaufrés et les chasses débris placés devant les éléments semeurs stimulent la germination des mauvaises herbes dans les lignes de semis. Dans les terres en semis direct, la protection contre l’érosion, la capacité de rétention de l’eau et l’activité biologique réduisent notablement le lessivage des produits phytosanitaires et des éléments nutritifs en profondeur. Grâce à l’enrichissement de la couche supérieure du sol en humus, les éventuelles substances toxiques sont rapidement dégradées et leurs résidus liés ; ainsi, ils risquent moins d’aboutir dans les émissaires des drainages.
Une couverture permanente du sol implique une adaptation de la stratégie de désherbage.
Adapter la stratégie de désherbage
Une couverture permanente du sol implique une adaptation de la stratégie de désherbage. Le matériel végétal à la surface du sol adsorbe les herbicides résiduaires et les désactive dans une large mesure. Cette couche protège par ailleurs les germes de mauvaises herbes de l’action des herbicides à action foliaire. Malgré l’action partielle des herbicides foliaires, il n’y a momentanément pas de solution de rechange. La stratégie de désherbage est difficile à mettre en œuvre, car les populations d’adventices ont atteint un développement de plusieurs feuilles au moment de l’intervention.
Une couverture permanente du sol offre abri et nourriture à différents animaux. C’est favorable aux auxiliaires qui, dans ce microcosme vivant, contribuent au maintien d’un agroécosystème stable. Sous cette couche de surface constituée de débris végétaux, les limaces trouvent l’humidité qui leur convient et peuvent constituer d’importantes populations. Avant la mise en place de cultures exposées aux limaces comme le colza, le tournesol et la betterave sucrière, il faut contrôler le champ peu avant le semis et, en cas de risque élevé, appliquer un molluscicide. Cette intervention augmente les frais de production et peut avoir des effets indésirables sur des organismes non ciblés, mais il en va de la récolte.
Le risque d’infections des cultures subséquentes par des maladies cryptogamiques à cause des résidus de récolte en surface dépend beaucoup des conditions climatiques et du cycle de développement de l’agent pathogène. Des principes agronomiques classiques comme une bonne rotation des cultures, le choix variétal, une bonne conduite de la culture ainsi qu’une gestion de la paille favorisant sa décomposition font baisser sensiblement les risques d’infections.
Mesures préventives
Des rotations de cultures diversifiées, des engrais verts multi-espèces, sont des mesures préventives contre ravageurs, maladies cryptogamiques et prolifération des mauvaises herbes. Le choix variétal pour chaque culture de la rotation et chaque engrais vert a des conséquences sur les maladies des plantes et sur l’utilisation des fongicides. Dans ce contexte, il ne s’agit pas de rechercher le rendement maximum pour chacune des cultures mais, à long terme, des rendements stables avec une bonne rentabilité sur l’ensemble de la rotation. L’insertion systématique d’engrais verts contribue efficacement à diminuer l’utilisation d’herbicides. De plus, les engrais verts ont un effet assainissant sur le sol et un effet préventif quant à l’envahissement par les mauvaises herbes.
Notre conseil
Eléments favorisant la diversité des espèces végétales
– Plantes compagnes et sous-semis : Les plantes compagnes et les sous-semis ont de nombreux effets positifs sur le sol et l’environnement. Bien installés, ils concurrencent les mauvaises herbes. Notamment des cultures associées au colza ont été testées dans le concept de l’Agriculture de Conservation : elles permettent de remplacer un herbicide en pré-levée, en post-levée ou après la récolte. Il faut cependant bien choisir la composition des espèces en fonction du but visé. Dans le colza, les plantes compagnes servent de fourrage de diversion pour les ravageurs et les limaces.
– Semis direct sous couvert végétal : Le semis direct d’une culture principale dans un engrais vert vivant peut permettre d’éviter l’application préalable d’un herbicide non sélectif et de faire des économies sur le désherbage en post-levée. Cette stratégie requiert une couverture du sol aussi complète que possible par l’engrais vert et une végétation dense qui concurrence les mauvaises herbes. Les espèces composant l’engrais vert doivent être choisies afin que leur croissance se termine par le gel ou par voie mécanique.
– Culture en relais : Le principe de culture en relais consiste à semer la nouvelle culture dans la culture principale précédente en croissance. Cette technique permet d’envisager des récoltes supplémentaires, d’accroître la productivité et d’améliorer l’efficience des ressources. Les agroécosystèmes sont plus stables grâce aux associations d’espèces végétales. En conditions idéales, il est possible de faire des économies d’herbicides, d’insecticides et de fongicides dans chacune des cultures envisagées.