Les émissions d’ammoniac dans l’agriculture sont une problématique connue. La Revue UFA a voulu savoir ce que proposait la plateforme nationale d’ammoniac et quelles mesures étaient efficaces au niveau de la construction.
Vous parcourez l’Est du pays comme coach en construction pour la Plateforme nationale d’ammoniac. Pouvez-vous nous expliquer précisément ce qu’est cette plateforme ?
La Plateforme nationale d’ammoniac est chapeautée par une direction de projet indépendante qui assume la coordination de ses divers organes. Elle poursuit les trois objectifs suivants :
– partage de connaissances entre tous les protagonistes – soutien, moyennant le coaching en construction, des maîtres d’ouvrages, des services techniques, des autorités et des entreprises – harmonisation des recommandations et des instruments ad hoc (outils et formules de calcul) en intégrant tous les acteurs ou actrices importants.
La HAFL, l’OFAG, l’OFEV et Agroscope participent également au projet. Les recommandations de la plateforme sont ainsi scientifiquement fondées, testées sur le terrain et peuvent être données en consensus avec tous les acteurs ou actrices concernés.
En quoi votre activité de coach en construction consiste-t-elle ?
Mon travail, c’est de conseiller les agriculteurs, les concepteurs et les installateurs de stabulations. La plupart du temps, on me fait intervenir quand un projet de construction a été refusé en raison des émissions d’ammoniac existantes ou quand il apparaît dès le départ que des mesures structurelles seront nécessaires pour réduire les émissions. De plus, des agriculteurs prennent contact avant même le dépôt de la demande de permis de construire, afin de faire passer leur projet du premier coup au travers de la procédure d’autorisation. Je cherche à mettre la théorie en pratique et à trouver la meilleure solution pour l’agriculteur ou l’agricultrice concernés dans les conditions données.
Y a-t-il des conflits d’objectifs, mais aussi des synergies, dans les projets que vous accompagnez ?
Mon objectif comme coach en construction, c’est de faire coïncider la réduction des émissions d’ammoniac et le bien-être animal. Un exemple, c’est l’aire d’affouragement surélevée avec des séparations : les vaches sont au sec, sans être perturbées par le racleur, robotisé ou non. Cette solution permet aussi d’éliminer les hésitations quant à une utilisation plus fréquente du système d’évacuation du fumier dans l’axe d’affouragement, là où sont émises une grande partie des déjections ; par ailleurs, grâce aux arceaux de séparation, les vaches de rang hiérarchique supérieur ne peuvent plus chasser les autres animaux le long de la table d’affouragement.
Les parcours intégrés sont un autre exemple de synergie possible : quand le parcours est combiné avec une aire de circulation, la surface souillée est moindre, permettant de réduire la surface construite et les coûts tout en contribuant au bienêtre animal.
Quant aux possibles conflits d’objectifs, en voici un exemple : quand un agriculteur ou une agricultrice désire convertir sa stabulation entravée en stabulation libre, il est pratiquement impossible de maintenir les émissions d’ammoniac après les travaux à un niveau inférieur à celle enregistrée auparavant.
Kilian Appert, coach en construction« J’essaie de trouver la meilleure solution pour l’exploitation selon les contraintes. »
Dans le cas de transformations, j’imagine qu’il n’est pas facile de mettre en place des mesures pour réduire les émissions. Quel est votre point de vue à ce sujet ?
C’est vrai. En pareil cas, nous faisons face à de nombreux facteurs limitants supplémentaires. Cependant, les transformations recèlent généralement un fort potentiel de réduction des émissions d’ammoniac au niveau de la stabulation. Je pense concrètement aux possibilités de remplacer les caillebotis traditionnels par des systèmes permettant un écoulement rapide des urines malgré une proportion réduite de fentes. Pour les sols planes en béton, il est aussi possible de créer une pente grâce à des tapis de caoutchouc préformés, permettant de continuer à utiliser le racleur existant moyennant une modification relativement simple.
Combien coûte l’intervention d’un coach en construction ?
Jusqu’à une certaine limite, l’intervention d’un coach en construction est gratuite pour l’agricultrice ou l’agriculteur, en tous cas s’agissant du premier entretien de conseil ainsi que de la visite sur place.
Ce sont toujours les exploitants qui assument les coûts de construction. Un tel investissement vaut-il vraiment la peine ?
Oui, car s’il est vrai que les maîtres d’ouvrage assument ces coûts, lorsqu’ils optent pour une mesure de construction reconnue, ils bénéficient du soutien de l’ordonnance fédérale sur les mesures d’améliorations structurelles et de celui de leur canton. Par exemple, pour la surélévation de l’aire d’affouragement, il existe une contribution de 210 francs par UGB jusqu’à la fin 2024 (état en janvier 2024 canton de FR ; le soutien peut varier d’un canton à l’autre).
Accompagnement par des coachs en construction
La Plateforme nationale d’ammoniac soutient et accompagne l’activité de quatre coachs en construction indépendants, qui se répartissent le territoire national : Erich von Ah et Markus Bucheli (Nord-ouest de la Suisse, Berne et Suisse centrale), Edith Paradis (Suisse romande et Fribourg) et Kilian Appert (Nord-est de la Suisse et Grisons).
Plus d’information sur le site : www.ammoniak.ch/fr