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Vie quotidienne

Du vin sans effets secondaires

Les vins sans alcool ont le vent en poupe, alors qu’un des processus pour produire ces vins existe depuis plus d’un siècle déjà. Un vin désalcoolisé diffère totalement du moût de raisin, le produit d’origine devant répondre à des standards spécifiques.

Le vin désalcoolisé présente un taux d’alcool résiduel de 0,5 % au maximum.

Le vin désalcoolisé présente un taux d’alcool résiduel de 0,5 % au maximum.

(Chat-GPT)

Publié le

Redactrice Revue UFA

Il y a peu de temps de cela, la carte d’un restaurant du centre de Bâle recommandait au menu un pinot gris désalcoolisé. Alors que pour les bières, les variantes sans alcool sont acceptées depuis longtemps, le vin dans sa version désalcoolisée suscite la méfiance. Les plus sceptiques se demandent alors si un verre de moût de raisin ne ferait pas l’affaire. Il suffit de goûter le pinot gris mentionné pour comprendre que le vin désalcoolisée n’a rien à voir avec ce produit : l’expérience gustative nouvelle révèle une saveur tout autre que celle du moût de raisin. Le vin très frais, léger, aux notes aigres-douces, ne procure pas cette discrète et habituelle sensation de brûlure dans la gorge.

Une idée qui n’est pas nouvelle

Mais que désigne exactement le terme « vin désalcoolisé » ? Comme son nom l’indique, il s’agit effectivement d’un vin de base alcoolisé, mais dont l’alcool a été extrait dans un deuxième temps, sachant qu’une teneur en alcool résiduel jusqu’à 0,5 % est tolérée. Deux techniques de fabrication sont habituellement utilisées : l’osmose inverse et la distillation sous vide. Cette dernière méthode a été brevetée par le fils de vigneron allemand Carl Jung, au début du XX e siècle, pour la fabrication du vin désalcoolisé et du vin mousseux. Ce vigneron était originaire de Rüdesheim am Rhein, région viticole par excellence, où l’on cultivait déjà la vigne au temps des Romains. Le crédo de Jung a dû être le suivant : le vin a besoin d’avoir du goût, pas de l’alcool.

L’alcool est retiré du vin dans une étape ultérieure.

Deux procédés pour extraire l’alcool

Dans le cas de la distillation sous vide, l’alcool au goût neutre est séparé du vin de base sous vide, à une température d’environ 30° C. On met ici à profit le fait que le point d’ébullition de l’alcool est nettement plus bas que celui des autres substances dans le vin, raison pour laquelle il s’évapore en premier. Grâce au procédé basse température, le vin conserve ses arômes et odeurs. L’alcool évaporé est ensuite refroidi dans un condensateur et peut être utilisé à d’autres fins.

L’autre procédé permettant la désalcoolisation du vin est l’osmose inverse. Il consiste à filtrer les substances aromatiques et les phénols du vin avec une membrane, avant que l’alcool contenu dans le concentré ne soit extrait par distillation. Puis, l’eau retirée durant le procédé est réintégrée au concentré. Coûteux, ce procédé peut nécessiter plusieurs passages, consomme beaucoup d’eau et ne permet pas de réutiliser l’éthanol.

Toute la différence est dans le vin de base

En théorie, chaque vin peut permettre d’obtenir un vin désalcoolisé. Cependant, dans la pratique, seuls des vins de base répondant à certaines exigences sont utilisés, comme l’explique Karin Kupper, gestionnaire de produit chez Rutishauser Divino : « L’alcool est un vecteur de goût, important pour l’impression en bouche. Le vin de base doit donc être excellent et aromatique. » En parlant d’impression en bouche, la gestionnaire de produit évoque cette sensation de liquide légèrement épais et visqueux, lorsque l’on boit du vin. Si cette sensation est inexistante avec le vin désalcoolisé, elle est compensée par l’arôme et la douceur qui prévalent. Selon Karin Kupper, cela est particulièrement vrai dans le cas du sauvignon blanc. Par contre, pour les vins rouges, il est plus compliqué d’obtenir cette forme de « compensation », car l’alcool est ce qui confère aux vins leur puissance. En revanche, dans le cas des vins mousseux, il est plus facile de renoncer à l’alcool, car c’est l’acide carbonique qui leur donne leur structure.

Certains fabricants travaillent avec des « botanicals », soit des épices qui sont ajoutées dans le vin. Cependant, les produits ainsi obtenus ne sont pas autorisés à porter la dénomination de vin.

Qui boit du vin sans alcool ?

Parmi les groupes cibles pour la consommation de vin désalcoolisé figurent en toute logique les personnes qui doivent s’abstenir de boire de l’alcool (femmes enceintes ou personnes conduisant des véhicules). Les gens qui aspirent à un mode de vie sain constituent également un groupe cible, en constante augmentation. L’apport calorique d’un vin alcoolisé est élevé puisqu’il peut contenir 100 kcal / 100 ml, sachant que le vin rouge dépasse le vin blanc. La version désalcoolisée ne contient quant à elle que 20 kca / 100 ml.

Par ailleurs, renoncer à l’alcool devient un phénomène de groupe avec des actions telles que le « Sober October » (octobre sobre) ou le « Dry January » (janvier sec). Les chiffres de la consommation d’alcool montrent du reste une claire tendance à la baisse (cf. graphique) : selon la statistique de l’OFAG, les gens en Suisse boivent de moins en moins de vin chaque année. Entre 2020 et 2024, c’est le vin rouge qui a le plus souffert de ce phénomène.

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Source : L’année viticole 2023, Statistiques vitivinicoles, Office fédéral de l’agriculture (OFAG)

(Revue UFA)

Le vin sans alcool trouvera-t-il sa place ?

Il n’est pas encore certain que le vin désalcoolisé arrivera véritablement à convaincre. Karin Kupper signale qu’elle dispose d’un petit assortiment de vin désalcoolisé chez Rutishauser Divino, en raison d’une demande de la clientèle. Force est de constater que même dans les rayons d’un commerce de détail suisse, le vin (presque) sans alcool a réussi à trouver sa place aux côtés des vins alcoolisés traditionnels. Seule une petite étiquette bleue, à côté de la dénomination d’origine sur le rayonnage, indique qu’il s’agit d’un vin désalcoolisé. Pour l’instant, aucun vin suisse de ce type n’est proposé dans le commerce.

Tout dépend certainement de l’évolution de la qualité de ce genre de vin, et de la confiance des consommateurs·trices pour acheter sans préjugé un vin désalcoolisé. En effet, la consommation de vin est fortement liée aux traditions, à une perception de valeur et aux émotions. 

Idées préconçues sur le vin sans alcool

… ne contient pas d’alcool

En UE, le vin sans alcool peut contenir un taux d’alcool résiduel de 0,5 %.

… a exactement le même goût que le vin normal

Les vins désalcoolisés se rapprochent du goût typique du vin mais paraissent souvent plus légers et moins complexes.

… est toujours plus sucré

Le vin sans alcool n’est pas systématiquement plus sucré. Il existe également dans des versions plus sèches.

… ne peut pas tourner

Tout comme le vin normal, le vin sans alcool peut s’oxyder et tourner, surtout après ouverture.

… en fait, c’est du jus de raisin

Le vin sans alcool est produit à partir d’un vin fermenté puis désalcoolisé, tandis que le jus de raisin est directement pressé des grappes de raisins. Le goût et les composants sont totalement différents.

… ne peut pas être stocké

Les vins sans alcool peuvent être stockés pendant un certain temps, même s’ils ne se conservent pas si longtemps que les vins conventionnels, ayant une date de durabilité minimale.

… est bien moins cher que le vin normal

Le vin sans alcool est aussi cher, si ce n’est plus cher, car sa fabrication est laborieuse, notamment en raison du procédé de désalcoolisation.

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