Lors de la fondation de la communauté d’intérêts IG Mittellandmalz, celle-ci avait déjà pour objectif de construire une malterie suisse. Christoph Nyfeler, propriétaire de l’entreprise Schweizer Mälzerei AG, était le chaînon manquant pour concrétiser ce projet. A l’origine, il s’est lancé dans l’aventure en tant que producteur de whisky. « Contrairement aux brasseries, nous ne pouvions pas apposer la croix suisse sur nos bouteilles, en raison de la provenance étrangère des matières premières », explique-t-il.
Le service de l’agriculture du canton d’Argovie l’a alors mis en contact avec l’IG Mittellandmalz. Il souligne encore à ce propos : « Nous avions un dénominateur commun : le besoin de matières premières suisses – du malt indigène plus précisément – pour nos produits. »
Importation et perfectionnement passif à l’étranger
Jusqu’alors, le malt de brasserie était surtout importé. Même l’orge de brasserie, pourtant cultivée en Suisse depuis une dizaine d’années sur plus de 250 hectares, devait être transformée dans les pays voisins. Cette nouvelle malterie suisse est donc loin d’être insignifiante. « Notre objectif principal est de créer une chaîne de valeur ajoutée intacte dans le secteur alimentaire et d’être rentable », souligne Christoph Nyfeler. Dès la deuxième année, l’installation a atteint un taux d’utilisation de 70 %, et l’année prochaine, ce taux devrait même atteindre 90 %.
Christoph Nyfeler, Schweizer Mälzerei AG« Beaucoup ne savent pas que, mis à part l’eau, la bière suisse est fabriquée avec des matières premières étrangères. »
Planification compliquée
Au cours des semaines qui viennent, une enquête sera menée auprès des acheteurs afin de déterminer les besoins pour l’année prochaine. « Il n’est pas toujours facile de faire comprendre pourquoi nous devons déterminer les besoins », explique le propriétaire de Schweizer Mälzerei AG. Les brasseries et les boulangeries sont en effet habituées à ce que le malt importé soit livré dans les 48 heures suivant leur commande, et ce, quelle que soit la quantité.
Les malteurs suisses ne peuvent pas rivaliser avec ça, même si la malterie argovienne produit 20 % de stock, comme l’explique Christoph Nyfeler : « Nous établissons notre planification avec un délai d’un an et demi, voire de deux ans. En juillet, nous attribuons les contrats de production pour l’année suivante. Nous transformerons ensuite la récolte à partir d’octobre 2024. »
Partenariats avec des start-up
En 2023, dans le cadre d’une série d’articles inti tulée « Start-up », le LID (Service d’information et de communication agricole) montre comment des exploitations agricoles et des jeunes entreprises profitent mutuellement de modèles commerciaux innovants et quels sont les défis qu’elles doivent affronter.
Soutien et conseils concernant le travail de relations publiques et le contact avec la clientèle sur www.lid.ch ➞ Bäuerinnen und Bauern (en allemand uniquement).
Diverses variétés et qualités de malt
La planification est notamment compliquée car elle concerne plusieurs produits. L’IG Mittellandmalz a besoin des retours des transformateurs afin d’estimer les besoins en malt Pilsen, Vienne, Munich, caramel ou de boulangerie ainsi que leur part IP-Suisse et Bio Suisse. « 80 % du malt produit ont déjà été écoulés en préventes », explique Christoph Nyfeler. Malgré la planification, la récolte et les besoins réels des brasseries dépendent finalement beaucoup des conditions météorologiques : « L’an dernier, le printemps chaud annonçait déjà une bonne année pour la bière, alors que cette année, la météo propice à la consommation de bières s’est fait attendre », explique le malteur.
Malt régional issu d’orge de brasserie locale
L’orge de brasserie suisse du canton d’Argovie est près de cinq fois plus chère que la concurrence étrangère. « Le prix de vente par bouteille s’en trouve ainsi augmenté d’environ cinq ou six centimes », d’après Christoph Nyfeler.
Christoph Nyfeler, Schweizer Mälzerei AG« Beaucoup ne savent pas que, mis à part l’eau, la bière suisse est fabriquée avec des matières premières étrangères. Nous avons encore du travail dans ce domaine. »
Il est cependant important pour lui que la culture d’orge de brasserie vaille la peine aussi pour les agriculteurs·trices. Au final, c’est aux consommateurs·trices de décider quelle valeur ils souhaitent accorder à une bière à base de malt suisse. Pour le pionnier de Schweizer Mälzerei AG, le problème est le suivant : « Beaucoup ne savent pas que, mis à part l’eau, la bière suisse est fabriquée avec des matières premières étrangères. Nous avons encore du travail dans ce domaine. »
La bière suisse reste un produit de niche. Les capacités de la malterie ne couvrent que 2 % environ des besoins suisses en malt. Avec l’essor des micro-brasseries et en raison de la demande croissante de produits régionaux, les brasseries de petite et de moyenne envergure misent de plus en plus sur les matières premières suisses, à la grande satisfaction de Christoph Nyfeler.
Schweizer Mälzerei AG
Depuis janvier 2022, l’entreprise Schweizer Mälzerei AG fournit du malt suisse issu d’orge de brasserie indigène. De la planification à la mise en service des installations, seul un an et demi s’est écoulé. La capacité de production annuelle s’élève actuellement à 1500 tonnes, avec un taux d’utilisation des installations d’environ 90 %.
La culture d’orge de brasserie – principalement de l’orge brassicole d’automne et un peu de blé de brasserie – est assurée par quelque 160 exploitations agricoles sur une surface totale de 400 hectares. Plus de deux tiers de la surface cultivée est certifiée IP-Suisse ou Bio Suisse. L’IG Mittellandmalz est responsable de la coordination des cultures. La récolte est quant à elle prise en charge par les centres collecteurs Maxi de Lyssach, Villmergen et Melchnau.