Lutte contre les adventices
Dans le maïs, les résistances ne posaient pas de problème jusqu’à maintenant, car on utilisait diverses combinaisons de substances actives pour lutter contre la flore adventice typique de cette culture. Les derniers herbicides à base de sulfonylurées présentent un large spectre d’action, ce qui permet de les utiliser sans les mélanger à un autre produit. Or des baisses d’efficacité ont été observées ces dernières années chez le panic pied-decoq, les sétaires, le millet des rizières, ainsi que le ray-grass. On a alors constaté que ces surfaces étaient uniquement traitées avec des substances actives du groupe des sulfonylurées. Les études scientifiques le confirment: des résistances à ces molécules se sont formées en peu de temps sur de grandes étendues. Tant qu’aucun nouveau type de produit herbicide ne se profile, il faut contrer l’apparition de résistances en alternant les substances actives et les stratégies de lutte, également dans le maïs. Les traitements chimiques doivent impérativement être accompagnés de mesures agronomiques sur l’ensemble de la rotation. Pour le maïs, cela implique notamment de lutter contre les biotypes résistants dans la culture précédente et suivante, à l’aide du travail du sol et de l’alternance des cultures. Ce dernier point permet non seulement de modifier les rapports de concurrence et de diminuer l’interligne, mais aussi d’utiliser d’autres substances actives, et ainsi de diminuer la pression des adventices.
Tenir compte du mode d’action
Pour améliorer la vue d’ensemble sur les produits, le Herbicide Resistance Action Committee (HRAC) a réparti les modes d’action dans différents groupes désignés par des lettres.
Une stratégie de lutte optimale implique d’utiliser différents modes d’action au sein de la rotation pratiquée par l’exploitation, en les alternant voire, encore mieux, en les combinant. Cela diminue le risque d’apparition ou de propagation de résistances. Selon les modélisations, les mélanges avec au moins deux modes d’action différents offrent de meilleures perspectives qu’un seul changement annuel de mode d’action.
La lutte contre les millets dans le maïs se doit d’être un succès. Si l’on lutte à 97%, le potentiel de départ des semences de millet subsiste dans le sol.
Cinq mécanismes d’action différents sont disponibles pour combattre les millets dans le maïs (tableau).
La terbuthylazine a une action foliaire et racinaire. Elle n’a qu’une efficacité partielle plus ou moins bonne contre le pâturin annuel, le vulpin des champs, l’agrostis jouet du vent et le ray-grass, et une efficacité insuffisante contre les millets. Elle doit être combinée avec d’autres substances actives pour lutter contre les graminées et dicotylédones annuelles. Hors des zones de protection des eaux souterraines et des régions karstiques, c’est toutefois la molécule à l’efficacité la plus large et la plus durable.
La pendiméthaline n’offre des résultats satisfaisants contre le vulpin des champs et l’agrostis jouet du vent qu’en traitement de postlevée très précoce.
Mesures pour une stratégie optimale de lutte contre les adventices
1. Connaissance précise de la flore adventice présente sur le champ, ainsi que des éventuelles résistances déjà existantes.
2. Utilisation conjointe d’au moins deux modes d’action présentant un spectre d’efficacité qui se cumule contre les millets et les dicotylédones dans une même application.
3. Eviter une sur-utilisation des substances actives autorisées par une rotation des herbicides racinaires, afin de réduire le risque de transfert dans les eaux souterraines de tels produits.
4. En cas de renoncement total aux herbicides racinaires, il est recommandé d’utiliser des produits contenant des tricétones, qui ne rencontrent jusqu’à présent pas de problème de résistance, en combinaison avec d’autres substances actives foliaires.
Protéger les eaux
Une alternance de stratégies herbicides peut aussi s’avérer judicieuse pour protéger les eaux souterraines, notamment dans les rotations chargées en maïs. Il s’agit de ne pas utiliser les quelques molécules disponibles contre les graminées et les millets chaque année sur la même surface. On empêche ainsi le transfert de substances et de produits de dégradation dans les eaux souterraines. Il faudrait donc alterner les substances actives dans les rotations chargées en maïs: les sulfonylurées graminicides devraient impérativement être utilisées en mélange avec d’autres substances actives. Par ailleurs, il faudrait les alterner tous les deux ans ou plus avec des solutions à large spectre, par exemple avec des mélanges à base de terbuthylazine, acétamides ou tricétones. Une telle stratégie nécessite le respect minutieux des périodes d’application: en raison de leur action racinaire, la terbuthylazine et les molécules an-ti-millets à base d’acétamide doivent être appliquées plus tôt que les sulfonylurées et tricétones, dont l’action est pratiquement uniquement foliaire. Le potentiel d’efficacité n’est ainsi pas compromis et des résultats satisfaisants peuvent être obtenus contre les adventices, y compris contre les populations de millets déjà moins sensibles.
Utilisation de mélanges en cuve
Hors des zones de protection des eaux souterraines et des régions karstiques, les produits à action racinaire (Syngenta recommande p. ex. Gardo Gold ou Dual Gold) mélangés avec un herbicide foliaire (p. ex. Callisto, Elumis) permettent de lutter efficacement contre la flore adventice typique du maïs. De telles combinaisons présentent un large spectre d’action, une efficacité de longue durée et plusieurs modes d’action contre les dicotylédones et les millets présents dans le maïs. L’efficacité de longue durée permet d’appliquer ces produits à des stades précoces de la culture. Les plantules de maïs sont alors particulièrement sensibles, surtout en présence de conditions climatiques changeantes. C’est la raison pour laquelle l’efficacité, mais aussi la tolérance de la culture sont importantes pour garantir un rendement optimal.
Le recours à des produits contenant de la terbuthylazine n’est pas autorisé en zone de protection des eaux souterraines ni dans les régions karstiques. Dans ces cas, les produits à action foliaire à base de tricétones peuvent contrer l’apparition de résistance des millets aux sulfonylurées. Syngenta recommande par exemple Callisto ou Elumis. Ces herbicides devraient être appliqués une fois que tous les millets et dicotylédones ont levé. Ces traitements peuvent être effectués sans problème jusqu’au stade 6 feuilles du maïs, mais une intervention aussi tardive devrait rester exceptionnelle.
AuteursDr Martin Schulte, Syngenta Agro GmbH, D-63477 Maintal Joël Meier, Syngenta Agro AG, 8157 Dielsdorf