Texte : Patrick Stefani
Les fruits à pépins bio ont le vent en poupe. Selon le Commentaire sur l’état du stock des fruits à pépins bio au 31 décembre 2022, les stocks de pommes de table bio ont fortement fléchi en décembre 2022. Régulièrement publié par Bio Suisse et Swisscofel, ce document faisait état d’une diminution de 708 t, soit 200 t de plus par rapport à décembre 2021. Lors de la journée dédiée à l’arboriculture bio (à Frick), Sabine Haller, cheffe de produit Fruits chez Bio Suisse, a confirmé cette tendance positive : « Actuellement, le marché des fruits à pépins bio est équilibré grâce à la forte croissance des ventes. Il est cependant possible que des excédents surviennent d’ici quelques années. » Le potentiel pour des quantités supplémentaires existe surtout pour les poires et les pommes de transformation. Complexe, la situation globale varie selon la qualité, la variété et l’acheteur.
Marché des fruits à pépins bio
Inoverde (nouveau nom de fenaco Produits du sol) surveille de près l’évolution du marché. Ces dernières années, l’offre et la demande en fruits bio ont crû en parallèle. Malgré cela, les quantités toujours plus grandes de fruits à pépins bio s’écoulent chaque année plus vite (voir graphique). Une fois les stocks vides, la demande doit être couverte par des importations jusqu’à la récolte suivante, soit une période allant jusqu’à six mois pour les poires. En effet, les réserves de poires (bio et conventionnelles) sont souvent vides en mars déjà. En revanche, les stocks de pommes diminuent plus lentement, suffisant jusqu’à l’été – mais la situation dépend du marché, de la qualité et de la variété.
Coop et Migros, les deux principaux clients d’Inoverde, écoulent plus de deux tiers des fruits à pépins bio suisses. Chez Inoverde, la part de bio pourrait encore être élargie : les variétés les plus demandées de pommes bio suisses sont déjà épuisées en hiver. Chez les négociants en fruits qui ont une part de bio plus élevée, les stocks durent plus longtemps.
Trois catégories de goût
Contrairement aux pommes conventionnelles, celles bio ne sont pas uniquement vendues en fonction de la variété ; chez Coop et Migros, par exemple, les variétés sont réparties en trois catégories de goût. Ainsi, les variétés peu connues ou résistantes ont aussi leur chance, pour autant qu’elles aient de bonnes qualités gustatives et visuelles, et qu’elles puissent être stockées. Par ailleurs, les directives de calibrage sont beaucoup plus souples pour les fruits bio que pour ceux conventionnels. Quoi qu’il en soit, les pommes rouges de belle apparence se vendent mieux, incitant les consommateurs·trices à en racheter. Or les variétés produites ne présentent pas toutes ces qualités. Ainsi, certaines pommes, comme les Golden et d’autres variétés rencontrant moins de succès, restent en stock jusqu’à l’été.
La variété Gala est tellement connue qu’elle domine le marché du bio.
Le cas de la Gala
La vente selon les catégories de goût ne fonctionne que de manière limitée. En effet, la variété Gala est tellement connue qu’elle domine non seulement le marché conventionnel, mais aussi celui du bio. Or, comme tous les producteurs·trices le savent, elle ne représente pas une « vraie » variété bio sur le plan de la technique culturale. Cependant, les consommateurs·trices en sont trop peu conscients : connaissant le nom de cette variété, ils n’en sont jamais déçus, bien que les pommes Gala n’arrivent jamais en tête de liste lors des dégustations.
Inoverde importe déjà des pommes Gala bio depuis le Tyrol du Sud (avec les taxes douanières qui s’ensuivent) pendant l’hiver pour couvrir la demande. Pendant ce temps, les stocks de pommes Gala conventionnelles tiennent jusqu’à la récolte suivante.
Des prix incitatifs
Les prix indicatifs de Bio Suisse visent à stimuler la production suisse afin que celle-ci couvre la demande. C’est pourquoi, lors des dernières négociations, le prix indicatif a été augmenté de 10 ct./kg pour les pommes et de 20 ct./kg pour les poires. Cette année, les prix à la production sont les suivants : 2 fr. 40 par kg pour les variétés demandées (p. ex. Gala) ; 2 fr. 00 par kg pour les variétés Golden ou Idared et 2 fr. 50 par kg pour toutes les variétés de poires. A ce jour, les producteurs·trices bénéficient du prix bio dès la première année de reconversion.
En fin de compte, il est difficile de prédire l’évolution à long terme du marché des fruits bio. Actuellement, il existe un potentiel de progression pour les pommes bio et, plus particulièrement les poires bio.