Chaque année, lorsque les fosses à lisier sont gentiment pleines et que le mois de février est bien avancé, il se pose la question de savoir s’il est déjà possible d’épandre du lisier. Sachant qu’un apport trop précoce est illégal, des règles claires et des listes de vérification aident à prendre une décision en la matière.
Un apport d’engrais de ferme liquides si tôt dans l’année n’est souvent pas encore de mise : en principe, il ne devrait être réalisé sur les prairies et les champs que lorsque la plante peut absorber les nutriments, c’est-àdire lorsque l’herbe a commencé à pousser.
Epandage en hiver
L’ordonnance sur la réduction des risques liés aux produits chimiques tient aussi compte du facteur d’absorption des nutriments. Selon cette ordonnance, il est interdit d’épandre des engrais azotés durant la période où les plantes ne peuvent pas absorber l’azote. Selon les régions, cette période peut durer plusieurs mois pendant l’hiver, en fonction de l’altitude et de l’exposition. Dans ces conditions, les plantes n’ont guère besoin de nutriments.
Fin du repos végétatif
Selon la définition admise par les instances concernées, le repos végétatif correspond à la période de l’année au cours de laquelle les plantes ne sont pas actives sur le plan de la photosynthèse et ne poussent donc pas. Or, les engrais de ferme liquides ne peuvent être épandus que lorsque la température moyenne de l’air dépasse 5° C durant sept jours. Dans ces conditions, la fin du repos – selon la définition qui prévaut – est ainsi atteinte. Les températures moyennes journalières ne sont cependant pas toujours faciles à estimer. Ainsi, il est recommandé de consulter les données de sa région sur Agrometeo. Par ailleurs, avant d’accrocher la citerne à lisier ou de poser les tuyaux, il faut s’informer de l’état du sol : si celui-ci est gelé, saturé d’eau ou recouvert de neige, l’apport d’engrais de ferme est interdit.
Listes de vérification
La plupart des cantons ont élaboré des listes de vérification concernant l’épandage d’engrais de ferme durant l’hiver. Si au moins un des critères ci-après est rempli, cette opération est interdite, car le risque de ruissellement ou de lessivage est trop grand :
– Le sol est saturé d’eau : il n’a plus de capacité d’absorption, car ses pores sont gorgés d’eau ; la terre est facilement modelable ou a une consistance de bouillie.
– Le sol est gelé : il est impossible d’y enfoncer un tournevis avec le plat de la main, et ce, à plusieurs endroits de la parcelle.
– Le sol est recouvert d’une couche de neige continue et qui persiste plus d’un jour.
– Le temps se caractérise par des précipitations importantes ou persistantes : des précipitations intenses (plus de 20 mm en 24 heures) ont eu lieu un ou deux jours auparavant, lesquelles se poursuivent ou sont attendues dans moins de trois jours.
Si aucune des conditions ci-dessus n’est réalisée, en principe, rien ne s’oppose à un apport d’engrais de ferme.
Exceptions admises
Si un critère (ou plus) parmi ceux susmentionnés est rempli, les agriculteurs·trices ne peuvent épandre les engrais en question que sous leur propre responsabilité et que si les conditions ci-après sont réalisées :
– La parcelle est plane avec un sol profond.
– Il n’y a pas de risque de ruissellement.
– La quantité à épandre est adaptée au sol et à la culture (max. 20 m 3 / ha).
– L’épandage est fait avec prudence sur les parcelles drainées, en maintenant la distance requise avec les fossés de drainage.
– L’épandage n’est pas réalisé dans des zones de protection des eaux souterraines ni à proximité des eaux de surface.
Avant d’accrocher la citerne à lisier, il convient de s’informer de l’état du sol.
Dans certaines listes cantonales, les besoins des cultures sont aussi évalués. En particulier, les prairies naturelles, les prairies artificielles, les cultures dérobées, le colza et les céréales d’automne bien développées devraient se trouver au stade qui précède directement la reprise de la végétation ; de même, les engrais verts hivernants devraient être verts et non gelés.
Concernant la praticabilité du sol, il convient d’éviter tout dommage dû au compactage juste avant la reprise de la végétation, tout en tenant compte du fait qu’un apport précoce d’engrais organiques sur des surfaces qui seront pâturées est recommandé.
Ainsi, la règle à suivre est d’épandre le lisier au maximum deux semaines avant le semis d’une culture de printemps s’il n’y a pas de production fourragère et au maximum un mois avant le début de la pâture.
Un épandage précoce d’engrais de ferme liquides a aussi des avantages : il permet une transformation rapide de l’azote lors de la reprise de la végétation, contribuant à réduire les pertes d’ammoniac.
Nouvelles prescriptions
Depuis le 1 er janvier 2024, l’apport d’engrais de ferme et d’engrais de recyclage liquides se fait obligatoirement au moyen de pendillards, dans toute la Suisse. En vertu de l’ordonnance sur la protection de l’air, sur les surfaces dont la déclivité est inférieure à 18 %, l’obligation d’épandre les engrais de ferme et les engrais de recyclage liquides selon des techniques appropriées de sorte à limiter le plus possible les émissions s’applique à toutes les exploitations de production. L’application de l’ordonnance varie d’un canton à l’autre, ce qui rend une vue d’ensemble difficile. Il convient cependant de se préparer correctement et à temps, en collaboration avec les organisations cantonales. En cas de difficultés de mise en œuvre, il est crucial que les mesures prises soient documentées et discutées avec les autorités, des prolongations de délai étant parfois possibles.
Notre conseil
Points à retenir pour l’épandage de lisier
Lors de l’apport de lisier, les points qui doivent être respectés conformément aux bonnes pratiques agricoles sont les suivants :
– Le lisier ne peut être épandu que sur un sol apte à l’absorber (ni saturé d’eau, ni desséché).
– Il convient de renoncer à épandre le lisier juste avant ou après de fortes précipitations, car il y a un risque de ruissellement.
– En présence de surface dont la déclivité ne dépasse pas 18 %, un apport par pendillards est obligatoire.