Coûts complets
La mise en valeur 2016 des coûts de production du lait avec le logiciel CoPro, réalisée par Agridea et le BBZN Hohenrain, se base sur les comptabilités des années 2013 à 2015. Les 316 exploitations de l’échantillon se situent pour 158 d’entre elles en plaine, pour 116 en zone de collines et pour 42 en zones de montagne.
En quoi consiste la méthode?
Le calcul des coûts de production permet l’analyse successive:
de la marge brute de la branche de production
du niveau des coûts de structure
de la rémunération effective du travail
Les coûts de production totaux intègrent l’ensemble des coûts réels, avec diverses clés de répartition possibles pour les charges de structure, ainsi que la prétention salariale de la famille exploitante à 28 fr./h et la rémunération théorique des capitaux propres à 0,75%. Ils permettent de rechercher le prix d’équilibre du lait et de se comparer à des références. L’outil permet aussi de connaître la rémunération réelle effective dans la branche de production laitière. Celle-ci s’élève en moyenne à 19 fr./h en plaine et à 13 fr./h en montagne.
Pourquoi calculer ses coûts de production?
La démarche d’analyse est en ellemême bénéfique, car elle permet de bien connaître ses résultats et de se les approprier, tout en mesurant les conséquences de ses choix techniques. On peut ensuite comparer ses propres coûts à ceux d’exploitations semblables, tous les résultats étant ramenés au litre de lait. On peut aussi s’interroger sur la cohérence entre résultats et objectifs et identifier des marges de manœuvre pour progresser, le but ultime étant d’optimiser ses marges et son revenu.
Une grande disparité dans les résultats
L’évolution des coûts de production sur plusieurs années démontre des fluctuations avec toutefois une constante: des coûts calculés en montagne bien supérieurs à ceux calculés en plaine (graphique 1). Ce résultat s’explique surtout par une différence marquée au niveau des coûts de structure réels et calculés, en lien avec la quantité de lait produite en plaine et en montagne. En effet, pour un nombre moyen d’heures de travail consacrées au troupeau et aux surfaces fourragères quasiment identique, soit 4062 h/an en plaine et 4012 h/an en montagne, la quantité moyenne de lait vendue par exploitation est deux fois supérieure en plaine (tableau Centres de coûts en production laitière en plaine et en montagne). La dilution des coûts de structure y est donc plus importante.
Cependant, en considérant l’ensemble des 316 exploitations et en analysant le revenu effectif du travail par heure en fonction du niveau de production par vache, les résultats sont très hétérogènes et la zone géographique n’est plus forcément discriminante (graphique 2). Ceci montre qu’une bonne rémunération du travail est possible, quels que soient la zone de production et le niveau de production des vaches. Ainsi, des marges de manœuvre existent pour chaque exploitation, même si certains postes sont plus difficilement compressibles que d’autres, comme les coûts de structure réels.
Analyser par critère
En dehors d’une comparaison entre les zones géographiques, il est aussi possible d’analyser les coûts de production par critère à l’intérieur d’une même zone (ici exemple de la plaine).
Prenons le niveau de production par vache, et partons de l’hypothèse que l’augmentation de la productivité par animal permet d’augmenter le bénéfice calculé (ou inversement). Que disent les résultats? Après analyse, on constate que les pertes calculées des exploitations ayant des vaches peu productives, avec moins de 6000 kg/vache, sont quasiment égales à celles des exploitations avec des vaches plus productives atteignant entre 8000 et 9000 kg/vache. Ces pertes calculées se situent à environ 9 ct./kg de lait. La répartition des coûts est également intéressante. Si les exploitations avec une plus faible productivité par vache présentent des coûts de structure plus élevés, elles affichent une meilleure maîtrise des coûts spécifiques, notamment pour les concentrés. Au final, leurs coûts de production calculés restent plus élevés, mais sont compensés par un meilleur prix du lait et plus de paiements directs. On constate que contrairement aux coûts de structure, une plus grande quantité de lait produite par vache ne permet pas une dilution des coûts spécifiques.
Le type de production PER ou bio est également intéressant à analyser. Les exploitations bio présentent des coûts de production calculés plus élevés de 17 ct./kg de lait que les exploitations PER. Ces coûts sont toutefois compensés par un prix du lait supérieur et plus de paiements directs. Au final, les exploitations bio couvrent à peine leurs coûts de production avec une perte calculée de 2 ct./kg de lait, contre une perte de 12 ct./kg de lait pour les exploitations PER. En outre, elles doivent respecter le cahier des charges de l’agriculture biologique et présentent des productions laitières par vache et des densités laitières à l’hectare nettement inférieures à celles des exploitations PER.
Concernant le lait vendu par exploitation, les coûts de production calculés diminuent avec l’augmentation du volume de lait. La productivité du travail double quasiment entre les exploitations livrant moins de 150 000 kg et celles livrant plus de 450 000 kg, passant de 62 à 117 kg de lait par heure de travail. Une grande quantité de lait vendue permet des économies d’échelle et notamment une dilution des coûts de structure. On observe cependant que les coûts spécifiques augmentent avec le volume de lait vendu. Ainsi, le coût des concentrés augmente sensiblement, atteignant 7.7 ct./kg de lait pour un volume inférieur à 150 000 kg et 13.7 ct./kg pour un volume dépassant 450 000 kg.
Comment valoriser les résultats?
Au-delà des calculs et des comparaisons entre exploitations, l’analyse des coûts de production doit s’accompagner d’une réflexion globale sur la cohérence du système, à savoir l’adéquation entre le milieu naturel de l’exploitation, comme le type de sol ou le potentiel fourrager, et les pratiques mises en œuvre pour obtenir les meilleurs résultats possibles. Il est aussi nécessaire de tenir compte de l’environnement économique de l’exploitation, par exemple la filière de commercialisation du lait et des contraintes structurelles de bâtiments et de parcelles. A partir de ces différents éléments, il devient possible de déterminer le système le plus cohérent, garantissant le meilleur revenu.
Pour le calcul des coûts de production de sa propre exploitation, il est possible de s’adresser au service de vulgarisation de son canton. Pour des compléments d’information sur la filière laitière en Suisse, Agridea propose une fiche thématique sur le marché du lait (www.agridea.ch/shop, article n o 2929). Des informations utiles sont également disponibles sur le site d’Agridea.
AuteursFabienne Gresset et Benoît Gascard, Agridea; Franz Sutter, Profi-Lait
Informationswww.agridea.ch
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